Le chef du parti radical, Pablo Iglesias, a posé des conditions très exigeantes aux socialistes pour la formation d'un gouvernement d'union des gauches en Espagne.
Avec son habituelle chemise blanche – cette fois-ci
agrémentée d’une cravate rouge sang –, sa déjà légendaire
queue-de-cheval et un aplomb de tous les diables, Pablo Iglesias a
enfilé les habits d’un homme d’Etat dessinant le futur proche de
l’Espagne. C’était lundi soir : flanqué de deux lieutenants de son parti
Podemos, le leader a offert une conférence de presse qui a stupéfié le
sérail politico-médiatique du pays. Se rêvant à la place du calife, le
politologue de 37 ans a défini les contours d’un futur «gouvernement du changement» en coalition avec le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) et les communistes de Gauche unie.
Tout en brandissant un document-programme de 100 pages présenté par l’intéressé comme «viable et crédible», Iglesias a défini les règles du jeu d’une potentielle alliance avec les socialistes : les radicaux de Podemos acceptent de former un «gouvernement de progrès» à la condition que leurs exigences soient d’emblée acceptées, notamment l’obtention de la moitié des ministères, la vice-présidence, la garantie d’un référendum d’autodétermination en Catalogne, l’augmentation des dépenses publiques à hauteur de 22 milliards d’euros c’est-à-dire la fureur assurée de Bruxelles et des bailleurs de fonds, etc. Rien de moins.
Face à un PP vainqueur étriqué du scrutin (129 députés), mais isolé et éclaboussé par les scandales, le bouillant socialiste Pedro Sánchez, avec ses 90 députés, est le seul à pouvoir former un exécutif stable. Or, récusant avec force toute coalition «à l’allemande» avec les conservateurs, la solution passe forcément par une entente avec Podemos. Après sept semaines de négociations et mille anicroches, un rapprochement semblait se profiler entre les deux forces de gauche. Mais les exigences avancées lundi par Pablo Iglesias ont tout pour dynamiter cette solution «à la portugaise» – pays où, en novembre 2015, une alliance de gauche a permis d’expulser la droite du pouvoir. Laconiquement, le Parti socialiste a rejeté la folle prétention du leader indigné par cette formule : «Pablo Iglesias a perdu le nord.» Sánchez, lui, a préféré se taire. Pour l’instant.
«Jamais je n’ai vu un tel numéro théâtral dans l’arène politique, réagit le chroniqueur d’El Mundo Casimiro Abadillo. En voyant Iglesias, j’avais l’impression d’avoir sous les yeux une sorte de star. A l’écouter, on aurait dit que c’est à lui, et non à Sánchez, à qui le roi avait demandé de former un exécutif !» Une opinion généralisée qu’exprime aussi l’analyste Victor Ruiz : «Jamais dans l’histoire de notre démocratie, un leader de parti minoritaire ne s’était arrogé la stupéfiante prérogative de définir la composition d’un hypothétique gouvernement et les grandes lignes de sa politique !»
Bien évidemment, il n’y a aucune chance que les socialistes acceptent ces ambitieuses requêtes. A commencer par le référendum d’autodétermination en Catalogne, «impensable» pour Pedro Sánchez qui s’est engagé, «quoi qu’il arrive», à «garantir l’intégrité et l’unité de l’Espagne». En l’état, il ne reste que deux options. Ou bien Pablo Iglesias est disposé à revoir ses revendications à la baisse, ou bien, comme le pensent la majorité des analystes, cette sortie théâtrale n’a d’autre but que d’obtenir un no fracassant des socialistes, forçant la tenue de nouvelles législatives au mois de mai.
Tout en brandissant un document-programme de 100 pages présenté par l’intéressé comme «viable et crédible», Iglesias a défini les règles du jeu d’une potentielle alliance avec les socialistes : les radicaux de Podemos acceptent de former un «gouvernement de progrès» à la condition que leurs exigences soient d’emblée acceptées, notamment l’obtention de la moitié des ministères, la vice-présidence, la garantie d’un référendum d’autodétermination en Catalogne, l’augmentation des dépenses publiques à hauteur de 22 milliards d’euros c’est-à-dire la fureur assurée de Bruxelles et des bailleurs de fonds, etc. Rien de moins.
«A la portugaise»
Cette proposition maximaliste a été qualifiée par l’essentiel des médias et de l’échiquier politique d’«humiliation» pour les socialistes. Et tout particulièrement à l’endroit de son leader Pedro Sánchez qui, à l’issue des très disputées législatives du 20 décembre, a été chargé par le roi Philippe VI de tenter de former le prochain gouvernement. Depuis la fin du franquisme, en 1975, jamais l’Espagne n’avait connu une telle instabilité institutionnelle : habitué aux majorités claires et à l’hégémonie du duopole Parti populaire (PP, conservateur) et Parti socialiste, le pays a vu l’irruption parlementaire de deux nouvelles formations lancées à la faveur de la crise économique, les centristes libéraux de Ciudadanos («Citoyens», 40 sièges) et les indignés pro-Syriza de Podemos («Nous pouvons», 69 sièges).Face à un PP vainqueur étriqué du scrutin (129 députés), mais isolé et éclaboussé par les scandales, le bouillant socialiste Pedro Sánchez, avec ses 90 députés, est le seul à pouvoir former un exécutif stable. Or, récusant avec force toute coalition «à l’allemande» avec les conservateurs, la solution passe forcément par une entente avec Podemos. Après sept semaines de négociations et mille anicroches, un rapprochement semblait se profiler entre les deux forces de gauche. Mais les exigences avancées lundi par Pablo Iglesias ont tout pour dynamiter cette solution «à la portugaise» – pays où, en novembre 2015, une alliance de gauche a permis d’expulser la droite du pouvoir. Laconiquement, le Parti socialiste a rejeté la folle prétention du leader indigné par cette formule : «Pablo Iglesias a perdu le nord.» Sánchez, lui, a préféré se taire. Pour l’instant.
«Jamais je n’ai vu un tel numéro théâtral dans l’arène politique, réagit le chroniqueur d’El Mundo Casimiro Abadillo. En voyant Iglesias, j’avais l’impression d’avoir sous les yeux une sorte de star. A l’écouter, on aurait dit que c’est à lui, et non à Sánchez, à qui le roi avait demandé de former un exécutif !» Une opinion généralisée qu’exprime aussi l’analyste Victor Ruiz : «Jamais dans l’histoire de notre démocratie, un leader de parti minoritaire ne s’était arrogé la stupéfiante prérogative de définir la composition d’un hypothétique gouvernement et les grandes lignes de sa politique !»
Services secrets
De fait, le leader de Podemos s’est taillé un rôle sur mesure. Selon ses exigences, sa formation devra diriger des ministères clés ; pas moins de neuf secrétariats d’Etat devront être créés, notamment celui de «la lutte contre la corruption», un des chevaux de bataille du parti radical ; quant à Iglesias lui-même, la vice-présidence devra lui revenir, ce qui dans la pratique lui permettrait d’avoir sous son contrôle les relations avec le Parlement, et le CNI (les services secrets). «En clair, ce que cherche Iglesias, c’est d’avoir un rôle prépondérant dans le futur exécutif, souligne le politologue Antonio Elorza. Dans ce cas de figure, il sait qu’à terme, c’est lui et son parti qui détiendraient le vrai pouvoir.»Bien évidemment, il n’y a aucune chance que les socialistes acceptent ces ambitieuses requêtes. A commencer par le référendum d’autodétermination en Catalogne, «impensable» pour Pedro Sánchez qui s’est engagé, «quoi qu’il arrive», à «garantir l’intégrité et l’unité de l’Espagne». En l’état, il ne reste que deux options. Ou bien Pablo Iglesias est disposé à revoir ses revendications à la baisse, ou bien, comme le pensent la majorité des analystes, cette sortie théâtrale n’a d’autre but que d’obtenir un no fracassant des socialistes, forçant la tenue de nouvelles législatives au mois de mai.
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