Source : L'Est républicain
Les compteurs Linky sont beaucoup moins tolérants que les anciens. D’où des coupures fréquentes, qui posent le problème de réadaptation des abonnements. Au profit de qui ?
Vous n’avez pas changé vos habitudes de consommation électrique, mais le disjoncteur saute dans votre logement. Et comme par hasard on a changé votre compteur pour le remplacer par un Linky ? Ce n’est peut-être pas un hasard. ERDF déploie depuis plusieurs semaines son plan de remplacement de compteurs sur le Grand Nancy, via son prestataire, la société OTI. Les nouveaux compteurs, dits intelligents, sont aussi beaucoup plus précis qu’auparavant, ce que confirme un technicien ERDF chargé du déploiement, et qui souhaite rester anonyme : « Quand votre ancien compteur tolérait plus ou moins 15 % de puissance, celui-ci coupe net directement au compteur. Un certain nombre de clients devront revoir la puissance de leur abonnement ».Intrusion
Guy Grandgirard, président de l’Association de défense des consommateurs de Lorraine (ADC54), s’est emparé du sujet dès 2013, avec pour cheval de bataille les risques liés au viol de la vie privée. Linky analyse en effet et télétransmet en direct les données de votre consommation à votre fournisseur d’énergie (ce qu’on appelle la courbe de charge). Mais Guy Grandgirad a vu aussi très vite, le problème posé par la non-tolérance du compteur : « Effectivement, dans certains cas, les usagers seront contraints de prendre un abonnement plus cher pour encaisser une légère surcharge de puissance. Passer de 6 kw, soit 6.000 watts à 9.000 watts soit 45 A, n’est pas négligeable à l’année en terme d’abonnement. Or, il n’y a pas de paliers de facturation plus fins ». Avec Linky, disjonctant immédiatement quand la puissance est dépassée, le changement de parc compteur peut se révéler une très belle opération pour les fournisseurs d’énergie. On passe ainsi chez EDF de 95,38 € pour 6 KVA à 117,20 € pour 9 KVA. Au plan national, l’UFC Que choisir dénonce sans ménagement le fonctionnement de l’appareil : « 15 millions de foyers risquent d’être pénalisés par le compteur Linky, qui va faire disjoncter le budget des consommateurs ».Du côté des professionnels, Emmanuel De Sordo, directeur territorial de Meurthe-et-Moselle pour ERDF, conteste fermement les études des associations de consommateurs : « La sélectivité des compteurs Linky est strictement identique à celle d’un disjoncteur normal. Linky enregistre une puissance réelle. Les usagers doivent regarder leurs usages réels et les adapter à la hausse ou à la baisse. Il n’y a aucune tromperie. Le client reçoit l’énergie qu’il paie ».
Mal abonnés
Au-delà du nouveau compteur et de son intrusion dans la vie privée « électrique » des usagers, un autre constat s’impose : selon les associations de consommateurs, plus de la moitié des ménages français_des milliers dans le Grand Nancy_ souffriraient d’un « mal-abonnement » : 5 millions paieraient plus cher qu’ils n’en ont besoin, et 10 millions de ménages auraient souscrit une puissance inférieure à leur consommation exacte. Cette situation était plus ou moins tolérée par l’ancien matériel, mais ne l’est plus avec Linky. Dont la vague d’installation ne s’est pas accompagnée d’une grande campagne d’informations. Dommage.
Pascal SALCIARINI
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