Source : Le bog d'Antoine Léaument
Connaissez-vous Donald Tusk ? Non ?
C’est normal. Il est un fantôme qu’on a décidé de mettre quelque part
pour « incarner l’Europe » et faire croire qu’elle est autre chose
qu’une machine à broyer les peuples pour leur faire cracher de l’argent à
destination des banques. En l’occurrence, Donald Tusk est président du
« Conseil européen ». Ça ne vous dit rien non plus ? C’est normal
aussi : l’Europe est une machine technocratique compliquée. C’est fait
exprès pour qu’on n’y comprenne rien (et je trouve que ça marche assez
bien). Le Conseil européen, c’est la réunion des chefs d’États et de
gouvernements qui sert à définir les grands axes de la politique
européenne.
Bref, voici Donald Tusk, qui ne sert à
rien. Donald Tusk a en théorie pour rôle d’arbitrer les matches de boxe
entre les États membres. Dans le cas présent, cela veut dire arbitrer
entre Merkel et les autres. Sauf que personne n’ose affronter la
chancelière allemande, à part Tsipras. Pour Le Monde, qui tient
absolument à nous faire croire que Donald Tusk sert à quelque chose
(pour justifier son salaire exorbitant de 300 000 euros par an), il « a
joué un rôle décisif lors du dernier sommet de la zone euro ». S’il en a
joué un, ce n’est pas celui d’arbitre : c’est de boxeur aux côtés de
Madame Merkel. François Hollande, lui, qui se croyait arbitre du match,
était en fait spectateur d’une mise à mort à laquelle il a participé en
n’intervenant pas.
Donc, Le Monde a décidé d’accorder une interview palpitante à Donald Tusk.
Voilà qui intéresse le peuple et déchaîne les passions. Non ? Et bien
figurez-vous que oui. Mais pas parce que Donald Tusk est intéressant :
parce que ce qu’il a dit est intéressant. Tellement que Le Monde a même fini par censurer ses propos ! Il
avoue que l’oligarchie dont il fait partie craint une contagion
politique et idéologique du cas grec. Voici ce qu’il a dit dans
l’interview (avant que celle-ci ne soit censurée), en répondant à la question : « l’aspect géopolitique est-il entré en ligne de compte dans les discussions dimanche ? » :
« Je suis surtout inquiet des risques de contagion politique et idéologique. Avec ce qui se passe en Grèce est apparue l’illusion idéologique qu’il est désormais possible de changer le cours de l’Europe, qu’on peut construire une alternative à la vision traditionnelle de l’Europe de l’austérité. Je trouve l’atmosphère très similaire à celle de l’après 1968. Je sens un état d’esprit, peut-être pas révolutionnaire, mais un sentiment d’impatience en Europe. »
Les mots parlent d’eux-mêmes : ce que
craint par-dessus tout l’oligarque Donald Tusk, c’est une « contagion
politique et idéologique » du cas grec. Il se rattrape évidemment après,
en reprenant le discours classique de l’oligarchie et en parlant
« des » extrêmes ou en disant que l’extrême droite et l’extrême gauche
c’est pareil, etc. Mais il n’empêche qu’il l’a dit : ce qu’il craint,
c’est que l’épisode grec s’étende au reste de l’Europe. Or, dans le cas
présent, cela veut dire deux grandes échéances : les élections générales
en Espagne où Podemos peut l’emporter et l’élection présidentielle en
France où nous pouvons renverser la table par une insurrection civique.
Je m’amuse assez, aussi, de ce que dit Donald Tusk sur l’état d’esprit quasi-révolutionnaire. Craindre une révolution, c’est avouer qu’on a quelque chose à y perdre.
C’est avouer qu’on n’est plus du côté du peuple. Beaucoup de gens en
France espèrent une révolution. J’en suis. Il suffit de parler une
dizaine de minutes avec à peu près n’importe qui : même les plus modérés
disent aujourd’hui qu’il « faudrait tout envoyer péter ». Pour
l’instant, c’est du conditionnel. Mais ça bouillonne dans le peuple. Et
le conditionnel finira par se transformer en indicatif. Puis en
impératif. Alors, trembleront les Tusk, les Merkel, les Hollande, les
banquiers, et tous ceux qui nous affament pour s’en mettre plein les
poches.
Pour l’heure, Donald Tusk confirme la
marche à suivre pour renverser l’oligarchie : emprunter le chemin qu’ont
ouvert Tsipras en Grèce, Iglésias en Espagne et Mélenchon en France.
Car on sent bien aujourd’hui que si ces trois-là étaient au pouvoir en
même temps, Merkel n’aurait pas pu imposer ses conditions à la Grèce.
Tusk l’avoue en disant qu’il craint moins les risques géopolitiques que
les risques politiques et idéologiques, et que c’est cela qui a présidé
dans la prise de décision sur l’accord grec.
L’Europe arrive à un moment historique.
Soit elle change et sert les peuples, soit elle continue à servir
l’oligarchie et elle disparaîtra. Ce que l’épisode grec a montré, c’est
que ce sont les nations qui ont la clé du changement.
C’est par les élections nationales qu’on peut réorienter l’Europe. Ou
en sortir, si le changement apparaît définitivement impossible. C’est la
ligne que tracent aujourd’hui Iglésias en Espagne et Mélenchon en
France, c’est à dire dans la quatrième et la deuxième économie de la
zone euro. Donald Tusk peut trembler, en effet. Et ses amis avec. Car
l’heure des révolutions approche, et nous l’attendons, nous, avec
impatience.
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