vendredi 13 novembre 2015

Meeting de la gauche non-gouvernementale à Montpellier : “Nous sommes le signal que tout un pays attend”

 Source : Les Inrocks
 
A trois semaines du premier tour des élections régionales, la liste Nouveau Monde, alliance de l’ensemble de la gauche non socialiste en région Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées donnait un grand meeting à Montpellier. Reportage.

Les militants ont du mal à s’y retrouver en cette soirée du 12 novembre à la buvette du parc des expositions de Montpellier : “Pourquoi il est orange ton drapeau? T’es au MoDem?”, blague une militante voyant passer un homme sous une bannière à la couleur du parti centriste. Que nenni. Aux quatre coins de la salle – comble –, des drapeaux aux couleurs de l’arc-en-ciel flottent : ce sont celles du logo de la liste Nouveau Monde en Commun (NMC) qui réunit la gauche du PS en Languedroc-Roussilon-Midi-Pyrénées. Dans le rôle du conquistador, l’écologiste Gérard Onesta (EE-LV), cousin du sélectionneur de l’équipe de France de handball Claude Onesta, conseiller régional sortant et ancien député européen (1999-2009).
“Le Front de gauche a la santé”
Ils sont au moins 3 000 à avoir fait le déplacement pour voir les têtes d’affiche de la gauche non-gouvernementale : Cécile Duflot, Pierre Laurent, Eric Coquerel, Noël Mamère, Liêm Hoang-Ngoc et Clémentine Autain. Parti Occitan, EELV, PG, PCF, NGS et Ensemble ont réussi l’exploit de s’unir pour le premier tour des élections régionales des 6 et 13 décembre prochain. “Marcher séparément, frapper ensemble”, dit le vieil adage trotskiste que ces forces semblent vouloir mettre en application. Un Front quasi-unique (comme en région Paca) construit aux forceps, alors que Cécile Duflot et Jean-Luc Mélenchon se boudent depuis le printemps dernier, dû à une tragique indigestion de hareng. Jean-Luc Mélenchon, dont la présence était annoncée à ce meeting exceptionnel, n’est finalement pas venu, pour cause de grippe. Ce qui donne l’occasion à Pierre Laurent de placer une punchline: “Personne n’est irremplaçable. L’un d’entre nous est cloué au lit, mais le Front de gauche a la santé.” Cécile Duflot prend la nouvelle avec moins d’humour si on croit Le Parisien daté du jour : “C’est bizarre pour quelqu’un qui dit vraiment vouloir l’unité d’annuler à la dernière minute… Il ne peut pas jeudi, mais il sera remis dimanche pour son émission.”
Cette brouille plus médiatique qu’autre chose n’entame pas le moral d’André, retraité à l’accent chantant et militant du PG : “On doit rassembler les forces de la gauche pour mener une politique d’opposition à l’austérité. On ne veut pas se retrouver en 2017 à devoir choisir entre SarkHollande et les Le Pen !” Sylvie, militante EE-LV “mais pas que, je suis écologiste avant tout”, espère elle que cette alliance d’un genre nouveau serve à la fois de “test et d’exemple à donner aux autres régions.” Elle déplore toutefois une couverture médiatique de ces régionales qui “s’intéresse plus aux querelles d’égo et pas vraiment au fond.” Ainsi les candidats de NMC ont signé une charte “éthique et démocratique” de 43 articles mêlant la “transparence”, “l’exemplarité”, “l’organisation de referendum locaux” ou encore “la protection des lanceurs d’alerte.”

L’adversaire socialiste
A la tribune, les têtes d’affiche se succèdent et vilipendent autant le Parti socialiste et le ministre de l’Economie Emmanuel Macron pour ses dernières saillies parues dans Le Monde, que Les Républicains de Nicolas Sarkozy ou le Front national de Marine Le Pen. Les motifs de griefs contre la gauche gouvernementale – “très gouvernementale, mais très peu à gauche!”, martèle Gérard Onesta – sont nombreux : de la mort de Rémi Fraisse à la libéralisation du travail le dimanche, en passant par le licenciement des“voyous d’Air France”, le “million de chômeurs en plus, la loi RSI qui lamine les libertés publiques” et “la criminalisation des mobilisations”, selon Clémentine Autain, porte-parole d’Ensemble et porte-flingue de la soirée.
Tous les intervenants ont unanimement dézingué l’idée émise par Manuel Valls de faire fusionner les listes PS et LR au deuxième tour des régionales : Et pourquoi pas demain faire un gouvernement d’union nationale ? Non mais ça va pas !”, s’emporte le député écologiste Noël Mamère. Le secrétaire national du PCF Pierre Laurent n’a pas fait preuve de plus d’indulgence envers à cette proposition : “C’est une déclaration de désertion, de renoncement, s’il en fallait encore une.”
L’exemple grenoblois
L’amertume suscitée par cette gauche au pouvoir à vite cédé le pas à l’espoir soulevé par la liste unitaire emmenée par Gérard Onesta. Comme à Grenoble aux municipales de 2014, la gauche non gouvernementale espère passer devant le PS en Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées. La référence planait comme un fantasme sur ce meeting à la portée symbolique. “Nous pouvons ouvrir une brèche dans le tripartisme fictif qui est en train de s’installer dans le pays”, estime Eric Coquerel, coordinateur national du Parti de Gauche. Plus explicite, Cecile Duflot s’est directement référée au mouvement citoyen construit sur le long terme par Eric Piolle et ses colistiers dans la capitale des Alpes:Ce n’est pas un cartel, c’est un rassemblement. Pas une addition, une multiplication. C’est ce que j’ai vu se construire patiemment à Grenoble. Je te souhaite le même succès qu’Eric Piolle.” En conclusion de son discours, la députée de Paris entonne Se Canta, l’hymne de l’Occitanie, rapidement repris par un public venu en nombre – et majoritairement communiste si on prend en compte les nombreux drapeaux du PCF et les applaudissements adressés à Pierre Laurent – ce soir au parc des expositions de Montpellier.
Pour clore ce meeting, Gérard Onesta s’est posé en fédérateur, synthétisant les traditions politiques incarnées par chacun des partis membres de sa coalition : “Je suis porteur des luttes sociales communistes, des valeurs républicaines défendues par le Parti de gauche, de la volonté de rassemblement d’Ensemble, de la fidélité au message de Jaurès que renouvelle la Nouvelle Gauche socialiste. De cette gauche qui a décidé de ne pas attendre de se ressembler pour se rassembler”, a-t-il énuméré sur un ton lyrique. Mais derrière les belles paroles de ce soir, il faudra maintenant pour le NMC affronte le verdict des urnes. Ce n’est qu’à ce moment-là qu’on saura si l’unité était bien réelle ou n’était que de façade.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire