Source : Novethic
Le Traité international sur les ressources phytogénétiques (Tirpaa) plie sous les intérêts des industries des semences. En dix ans, ces dernières n’ont pas versé un sous au fonds destiné au partage des avantages liés à l'utilisation de la biodiversité des semences paysannes. La réforme du système, débattue à Rome début octobre 2015, a vu l’alliance contre-nature de la multinationale Syngenta avec l’ONG La Déclaration de Berne (DB). Leur solution : limiter l'utilisation du patrimoine génétique mondial aux firmes disposées à verser un certain pourcentage de leur chiffre d'affaires au profit de l'exploitation durable de la biodiversité.
Le Traité international sur les ressources phytogénétiques (Tirpaa) plie sous les intérêts des industries des semences. En dix ans, ces dernières n’ont pas versé un sous au fonds destiné au partage des avantages liés à l'utilisation de la biodiversité des semences paysannes. La réforme du système, débattue à Rome début octobre 2015, a vu l’alliance contre-nature de la multinationale Syngenta avec l’ONG La Déclaration de Berne (DB). Leur solution : limiter l'utilisation du patrimoine génétique mondial aux firmes disposées à verser un certain pourcentage de leur chiffre d'affaires au profit de l'exploitation durable de la biodiversité.
La biodiversité des semences paysannes est une source
d’innovation pour les sélectionneurs. Pour faciliter leur accès à ces
ressources tout en respectant les principes de la Convention sur la
diversité biologique, le Traité international sur les ressources
phytogénétiques pour l'alimentation et l'agriculture (Tirpaa) a mis en
place en 2005 un système multilatéral. Il permet aux industriels
d’accéder à 60 % de la diversité des semences recensées au niveau
mondial. En contrepartie, les firmes doivent abonder un fonds destiné à
financer le partage des avantages liés à leur utilisation de ce
patrimoine génétique. Le système repose aussi sur la garantie pour les
paysans de pouvoir continuer à utiliser, échanger et vendre les semences
qu’ils ont versées au pot commun, c'est-à-dire aux banques de gènes
nationales.
Or, depuis 10 ans, les industriels concernés n’ont rien versé à ce fonds. En cause : l’impossibilité de contrôler si les semences commercialisées par Syngenta, Monsanto ou Limagrain contiennent ou non des gènes puisés dans les collections du système multilatéral. Les industriels eux-mêmes affirment ne pas pouvoir tracer les gènes qu’ils utilisent.
Face à cette impasse, une réforme du système multilatéral a été débattue du 5 au 9 octobre 2015 à Rome. La Suisse a en particulier proposé d’obliger toutes les firmes semencières à verser un certain pourcentage de leur chiffre d'affaires au fonds. Cette proposition a été portée par des organisations antagonistes : la multinationale Syngenta et l’organisation non-gouvernementale (ONG) contre le brevetage du vivant, La Déclaration de Berne.
Cette proposition a-t-elle une chance d’aboutir ? Oui, selon La Déclaration de Berne. "Les industries des semences y ont intérêt pour accéder à plus de ressources", explique François Meienberg, expert de l’organisation. En effet, certains pays du Sud signataires du Traité limitent leur patrimoine génétique accessible tant que le partage des avantages n’est pas opérationnel. Une soixantaine d'espèces de cultures sont couvertes par le Traité, certaines espèces importantes étant exclues comme le soja ou la tomate. "Si les entreprises sont prêtes à payer, les pays signataires seront prêts à ouvrir plus largement leurs banques de gènes", explique François Meienberg.
Mais tous ne partagent pas cet avis. D’abord, plusieurs pays, dont la France, ont réclamé que ce système de financement repose sur une base volontaire. Par ailleurs, "des contournements restent possibles, explique Guy Kastler, du réseau Semences paysannes, toutes les ressources disponibles dans le cadre du système multilatéral étant également disponibles dans d’autres collections", en particulier des collections américaines, les Etats-Unis n’étant pas signataire du Tirpaa. Autrement dit, un industriel peut puiser dans le pot commun des ressources du système multilatéral puis affirmer ensuite qu’il a trouvé cette ressource ailleurs.
Un autre pilier du traité est mis à mal par l’activité des industries semencières : le droit des agriculteurs d’utiliser et de vendre leurs semences. Ces entreprises multiplient en effet les brevets sur des gènes natifs, s’appropriant ainsi du matériel génétique puisé dans les collections du système multilatéral. Les paysans voient les semences qu’ils ont remises aux banques de gènes devenir la propriété des multinationales.
"Le traité doit interdire la brevetabilité des gènes natifs", pointe Guy Kastler. Un point de vue partagé par la Convention de Berne, qui est une des rares organisations à essayer de traquer les abus de brevetage du vivant devant l’Office européen des brevets.
Les organisations paysannes, la Via campesina en tête, menacent de sortir du Tirpaa si leurs intérêts ne sont pas mieux défendus. Jusqu’à présent, les paysans ont joué le jeu au motif que le Tirpaa est le seul texte international à reconnaître le droit des agriculteurs sur leurs semences. Le versement des semences au système multilatéral est également une preuve de leur antériorité pour s’opposer à la "biopiraterie" (voir InfOGM).
En face, les industries des semences marginalisent le système multilatéral. Elles créent en parallèle des banques de gènes privées, où elles n’ont de compte à rendre qu’à leurs membres (Voir l’exemple sur les semences potagères).
Magali ReinertImpasse
Or, depuis 10 ans, les industriels concernés n’ont rien versé à ce fonds. En cause : l’impossibilité de contrôler si les semences commercialisées par Syngenta, Monsanto ou Limagrain contiennent ou non des gènes puisés dans les collections du système multilatéral. Les industriels eux-mêmes affirment ne pas pouvoir tracer les gènes qu’ils utilisent.
Face à cette impasse, une réforme du système multilatéral a été débattue du 5 au 9 octobre 2015 à Rome. La Suisse a en particulier proposé d’obliger toutes les firmes semencières à verser un certain pourcentage de leur chiffre d'affaires au fonds. Cette proposition a été portée par des organisations antagonistes : la multinationale Syngenta et l’organisation non-gouvernementale (ONG) contre le brevetage du vivant, La Déclaration de Berne.
Cette proposition a-t-elle une chance d’aboutir ? Oui, selon La Déclaration de Berne. "Les industries des semences y ont intérêt pour accéder à plus de ressources", explique François Meienberg, expert de l’organisation. En effet, certains pays du Sud signataires du Traité limitent leur patrimoine génétique accessible tant que le partage des avantages n’est pas opérationnel. Une soixantaine d'espèces de cultures sont couvertes par le Traité, certaines espèces importantes étant exclues comme le soja ou la tomate. "Si les entreprises sont prêtes à payer, les pays signataires seront prêts à ouvrir plus largement leurs banques de gènes", explique François Meienberg.
Abus de brevetage
Mais tous ne partagent pas cet avis. D’abord, plusieurs pays, dont la France, ont réclamé que ce système de financement repose sur une base volontaire. Par ailleurs, "des contournements restent possibles, explique Guy Kastler, du réseau Semences paysannes, toutes les ressources disponibles dans le cadre du système multilatéral étant également disponibles dans d’autres collections", en particulier des collections américaines, les Etats-Unis n’étant pas signataire du Tirpaa. Autrement dit, un industriel peut puiser dans le pot commun des ressources du système multilatéral puis affirmer ensuite qu’il a trouvé cette ressource ailleurs.
Un autre pilier du traité est mis à mal par l’activité des industries semencières : le droit des agriculteurs d’utiliser et de vendre leurs semences. Ces entreprises multiplient en effet les brevets sur des gènes natifs, s’appropriant ainsi du matériel génétique puisé dans les collections du système multilatéral. Les paysans voient les semences qu’ils ont remises aux banques de gènes devenir la propriété des multinationales.
"Le traité doit interdire la brevetabilité des gènes natifs", pointe Guy Kastler. Un point de vue partagé par la Convention de Berne, qui est une des rares organisations à essayer de traquer les abus de brevetage du vivant devant l’Office européen des brevets.
Banques de gènes privées
Les organisations paysannes, la Via campesina en tête, menacent de sortir du Tirpaa si leurs intérêts ne sont pas mieux défendus. Jusqu’à présent, les paysans ont joué le jeu au motif que le Tirpaa est le seul texte international à reconnaître le droit des agriculteurs sur leurs semences. Le versement des semences au système multilatéral est également une preuve de leur antériorité pour s’opposer à la "biopiraterie" (voir InfOGM).
En face, les industries des semences marginalisent le système multilatéral. Elles créent en parallèle des banques de gènes privées, où elles n’ont de compte à rendre qu’à leurs membres (Voir l’exemple sur les semences potagères).
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