Le Conseil national de la Résistance fut réactivé l'été 2008. Le CNR en Midi-Pyrénées est la déclinaison régionale de ce réseau organisé pour mener une résistance créatrice d'alternatives. Nous contribuons ainsi par notre action politique coopérative à construire Un Autre Monde...
"Créer, c'est Résister. Résister, c'est créer."
Avalisées
par le Parlement de Strasbourg le 8 mai 2015, les tractations secrètes
en vue d’établir un grand marché transatlantique (GMT) se poursuivent
entre l’Union européenne et les Etats-Unis. Mais, face aux dangers de ce
traité de libre-échange, une résistance s’organise des deux côtés de
l’Atlantique, jusqu’au cœur des collectivités territoriales.
par Amélie Canonne &
Johan Tyszler
«Le conseil régional d’Ile-de-France (...) demande
l’arrêt des négociations sur le Partenariat transatlantique de commerce
et d’investissement (TTIP), dit grand marché transatlantique (GMT), du
fait de l’absence de contrôle démocratique et de débat public sur les
négociations en cours. » La région Ile-de-France fut la première dans l’Hexagone à se déclarer « zone hors TTIP » (ou « hors Tafta »,
pour reprendre l’acronyme du premier nom anglais du projet,
Transatlantic Free Trade Agreement). Depuis le vote de cette
délibération le 14 février 2014, près de 500 collectivités territoriales
françaises de toute taille ont voté une motion similaire, représentant
54 % de la population du pays.
L’adoption d’un tel texte par une instance politique territoriale
demeure un acte essentiellement symbolique. Toutefois, les assemblées
délibératives mobilisées posent ainsi les jalons d’une contestation
contre les traités de libre-échange et d’investissement qui s’étend
désormais à travers la France et l’Europe (voir la carte).
Outre les partis politiques, les citoyens sont nombreux à proposer à
leurs élus locaux (région, département, municipalité) de voter une
motion. C’est dans cet esprit que le collectif Stop Tafta, qui fédère de
nombreuses associations, syndicats et partis politiques, propose un
modèle de délibération et invite tout un chacun à l’adresser à ses
représentants. Le vote d’une telle résolution par une collectivité ne
protégera pas son territoire des dangers du GMT, puisque les accords
internationaux engagent juridiquement tous les échelons institutionnels
des Etats membres. Plusieurs préfets français n’ont pas manqué de le
rappeler aux instances frondeuses. Mais la motion « zone hors Tafta »
permet de sensibiliser les élus et d’amorcer la mobilisation autour de
questions très sensibles pour les municipalités : la préservation de
l’emploi, la protection des services publics ou de l’environnement,
l’irruption d’entreprises américaines sur les marchés publics locaux…
Les militants espèrent que le débat enclenché dans un contexte de
proximité pourra percoler dans les appareils politiques nationaux. « Le
fait que la motion ait été adoptée dans une ville comme Tulle, dont
l’actuel président de la République a été le maire de 2001 à 2008 est
pour moi symbolique et d’une importance stratégique, précise M. Samuel Désaguillier, conseiller municipal de la ville. Plusieurs communes de couleurs politiques variées ont adopté une motion similaire en Corrèze. »
L’Allemagne compte 228 zones « hors Tafta », dont les villes de Cologne, Leipzig ou Munich ; l’Autriche affiche 260 municipalités en dissidence ; la Belgique 82 communes, dont Bruxelles ;
le Royaume-Uni, 21 villes et comtés, dont Edimbourg (Ecosse) et
Bristol. Les villes de Milan et Ancône rejoignent le mouvement en
Italie, et la victoire de Podemos aux élections locales espagnoles, en
mai dernier, stimule déjà la dynamique de l’autre côté des Pyrénées. Des
militants tchèques souhaitent également encourager des initiatives
locales dès l’automne 2015.
« Comme un troll des contes norvégiens »
Bien sûr le projet de GMT n’est pas le premier accord de commerce et
d’investissement représentant une menace de cette ampleur. Entré en
vigueur le 1er janvier 1995, l’Accord général sur le commerce des
services (AGCS) fut préalablement discuté pendant plusieurs années dans
la plus grande opacité (1). Mais sa mise au jour provoqua la colère des citoyens européens et la structuration d’une résistance autour des « zones hors AGCS », au début des années 2000. « Nous
sommes confrontés à quelque chose qui avance rapidement et qui est
inatteignable pour les mobilisations ordinaires, l’idée est de changer
le rapport de forces à la base, et d’alerter les élus locaux »,
explique M. Frédéric Viale, qui participa à la mobilisation anti-AGCS
au sein du mouvement Attac. La campagne avait alors pris une ampleur
inattendue : 816 collectivités locales et 20 des 22 régions de France
métropolitaine l’avaient rejointe en quatre ans. Face aux sceptiques
vis-à-vis de ce type de démarche symbolique, M. Viale rétorque : « Ce fut une épine très douloureuse dans le pied de l’OMC ! »
Dès 2013, la coopération entre les différents mouvements européens s’est organisée, et les « zones hors Tafta »
ne représentent aujourd’hui qu’une facette de la mobilisation
paneuropéenne. Contrairement à la campagne anti-AGCS, la résistance
actuelle dépasse très largement le cercle des militants engagés. Elle
s’appuie également sur l’Initiative collective européenne (ICE)
présentée à la Commission européenne en juin 2014 : 230 organisations
d’une vingtaine de pays lançaient une pétition demandant au Conseil
européen d’abroger le mandat de négociation et de ne pas conclure
l’autre traité de libre-échange en cours avec le seul Canada. Nouveauté
du traité de Lisbonne, depuis 2011, l’ICE permet à de simples citoyens
d’inviter la Commission à soumettre au Conseil et au Parlement européens
une proposition d’acte juridique sur un sujet à condition de réunir un
million de signatures dans au moins sept pays.
Le 10 septembre 2014, la Commission a rejeté l’initiative en estimant
que l’ouverture des négociations n’était qu’un acte préparatoire, et
non un acte juridique entrant dans le champ légal d’une ICE. Contestant
cette décision devant la Cour de justice de l’Union européenne, les
promoteurs de l’initiative entendent bien la poursuivre de manière « auto-organisée »
grâce à un regroupement de plus de 480 organisations. L’objectif :
réunir 3 millions de signataires en un an, et lancer la plus importante
pétition européenne jamais enregistrée à ce jour. La collecte s’opère de
façon décentralisée dans chaque Etat membre, où un seuil, nombre
minimal de signatures requises pour qu’une ICE soit valide, est défini
en fonction du nombre d’habitants — il est par exemple fixé à
55 500 signatures pour la France (2).
Plus le débat et les inquiétudes publiques sont dédaignés par les
institutions, plus la contestation s’amplifie. En septembre 2015, déjà
plus de 2,6 millions de signatures ont été rassemblées, et l’objectif
d’une clôture de l’initiative le 6 octobre semblait atteignable. Au même
titre qu’une motion « hors Tafta »,
l’utilité première de cette pétition reste sa portée mobilisatrice et
éducative. La coalition européenne rassemblée autour de cette initiative
a traversé l’Europe durant l’été à la rencontre des citoyens, afin de
renforcer l’effort de sensibilisation et de rendre audible une question
formulée dans un langage technico-légal sibyllin. « Ce traité est comme un troll des contes norvégiens : il se transforme en pierre lorsqu’il est exposé à la lumière du jour, explique Mme Laura Gintalaitè, militante lituanienne de la coalition. C’est
l’objectif de la campagne : pays par pays, signature par signature,
mettre les traités de libre-échange en lumière parce qu’ils n’y
survivront pas. » Car, lorsque les
citoyens découvrent les conséquences potentielles de ces accords
commerciaux sur les modèles de santé, d’éducation, d’agriculture ou
encore sur l’environnement, ces traités perdent toute légitimité.
Comme dans le cas de l’AGCS, nombre d’élus des Parlements nationaux
et européen ne s’intéressent guère aux questions liées au commerce et à
l’investissement. Beaucoup se satisfont d’une position théorique, sans
connaissance des implications véritables des traités dans lesquelles ils
engagent leurs concitoyens. Le 8 juillet dernier, le Parlement européen
était invité à prendre position sur les négociations, lors du vote
d’une résolution d’initiative, procédure courante à Strasbourg. Les
parlementaires devaient notamment se prononcer sur l’inclusion ou non
d’un mécanisme de règlement des différends permettant à des entreprises
étrangères d’attaquer les Etats devant des tribunaux arbitraux (3). Déjà, lors de la consultation lancée par la direction générale du commerce à la fin de 2014, 97 % des avis exprimés par le public étaient hostiles à un tel mécanisme.
Alors que, parmi les députés allemands à Strasbourg, seuls les élus
écologistes et de Die Linke ont émis un vote défavorable, les
socialistes français élus à Strasbourg ont choisi de rejeter ce
dispositif et unanimement voté contre la résolution. La division du
groupe social-démocrate peut être interprétée comme le résultat de la
pression populaire exercée via les zones hors Tafta et l’ICE, mais aussi
par des dizaines de milliers de courriels et d’appels téléphoniques
directement adressés aux eurodéputés avant le vote. De l’aveu même de
ces derniers, cette pression a forcé les élus européens à prendre
position sur ce qui est devenu la question politique clé des derniers
mois à Strasbourg. Après avoir dû reporter le vote d’un mois faute de
majorité, le président social-démocrate du Parlement, M. Martin Schulz, a
pu obtenir l’aide des libéraux et des conservateurs en maintenant un
mécanisme d’arbitrage, mais avec des juges professionnels, désignés par
les pouvoirs publics, et une possibilité de faire appel de leurs
décisions.
Les Allemands, les Britanniques, les Autrichiens et les Français
mènent des campagnes particulièrement actives et pugnaces. Le nombre de
signatures requis pour qu’une pétition soit valide dans le cadre des ICE
a été atteint en quelques semaines. La résistance se construit
également à l’Est : des pays comme la République tchèque, la Croatie et
la Hongrie ont récemment atteint leurs seuils respectifs de recevabilité
de l’initiative citoyenne — ce qui apparaît remarquable dans ces pays
où les questions européennes captivent rarement les citoyens ou les
responsables politiques. De fait, dans cette partie de l’Europe, la
mobilisation se heurte souvent à d’autres difficultés, géopolitiques et
sociales, confie Mme Madalina Enache, une militante roumaine : « C’est
très difficile de sensibiliser sur un sujet aussi compliqué que le GMT.
Ici, si vous n’êtes pas avec les Américains, vous êtes d’emblée
prorusse. Il y a aussi une forme de blocage. Les gens pensent que cet
accord permettra d’atteindre un meilleur niveau de développement basé
sur le rêve américain. »
Depuis le lancement des négociations, une multitude de débats, de
rencontres, de conférences décryptant les dangers du GMT s’organisent
dans toute l’Europe. Le 11 octobre 2014, pas moins de 1 100 actions de
protestation (marches, réunions, collectes de signatures, etc.) ont eu
lieu, dans 22 pays ! Mais que faire une fois les millions d’Européens et d’Européennes sensibilisés ?
L’entrée en vigueur des traités n’étant pas prévue avant plusieurs
années, la campagne s’inscrit dans la durée, d’autant plus que les
négociations enregistrent peu d’avancées significatives susceptibles de
canaliser la protestation.
Sourde aux critiques et aux demandes des citoyens, mais largement
perméable aux revendications des multinationales des secteurs de
l’énergie, de la finance ou de l’agrobusiness, la Commission européenne
s’obstine à négocier, et dans le plus grand secret (4).
Seul le Conseil des chefs d’Etat et de gouvernement a les moyens
politiques de l’arrêter. Mais, même dans les pays où les citoyens et
leurs représentants locaux se sont massivement prononcés contre le
projet de GMT (en Allemagne ou en Autriche par exemple), aucun
gouvernement ne veut prendre la responsabilité d’opposer son veto à la
poursuite des négociations. La campagne de mobilisation et le travail
d’éducation populaire pour donner les outils de compréhension
nécessaires aux élus et aux citoyens ne font que commencer.
Amélie Canonne &
Johan Tyszler
Respectivement présidente de l’Association internationale de
techniciens, experts et chercheurs (Aitec), spécialiste des questions
liées aux politiques de commerce et d’investissement, animatrice de la
campagne contre le Tafta en France et en Europe et chargé de campagne
contre le Tafta en France au sein des associations Aitec et Attac,
animateur du collectif national Stop Tafta.
(2)
Pour calculer le nombre minimum de signatures à recueillir par pays, il
faut multiplier le nombre de députés européens de ce pays par 750. En
juillet 2015, un an après son lancement, ce seuil avait été dépassé dans
18 pays de l’Union.
(4)
Le secret est tel que le réseau WikiLeaks a lancé une souscription pour
offrir une prime de 100 000 euros à toute personne qui rendra public le
texte du traité en cours de négociation.
Malgré ses discours en faveur de
l’agriculture biologique, le ministre de l’Agriculture vient de décider
une coupe claire dans les aides à celle-ci. Alors qu’elle rend services à
l’intérêt général - en ne polluant pas - et crée de nombreux emplois.
Stéphanie Pageot
et Denez L’Hostis
Actualisation le 17 mars 2015 :Le gouvernement est revenu en arrière et annonce le maintien des aides concernées cette année
Alors qu’en mai 2013, le ministre de l’Agriculture annonçait son programme « Ambition bio »
avec l’objectif de doubler les surfaces cultivées en France selon les
méthodes de l’agriculture biologique d’ici 2017 (passer de 1 à 2
millions d’hectares, soit de 4 à 8 % de la surface agricole utile), l’annonce par arrêté du 7 mars 15 d’une réduction de 25 %
des aides au maintien pour les producteurs bio est vécue comme une
injustice flagrante et une incohérence totale avec les ambitions.
Pourquoi ?
Parce que cela signifie d’abord que le ministère ne croyait pas en la
réussite de son plan puisqu’il n’a pas prévu de budget suffisant alors
que nous avions prévenu, dès 2012, des risques de dépassement
budgétaire.
Deuxièmement, parce que l’agriculture biologique est le système le
plus abouti de l’agro-écologie, chère à Stéphane Le Foll, et qu’il
aurait dû la soutenir avant toute chose.
Enfin, parce que dans un système agricole malheureusement basé sur
les aides d’une Politique Agricole Commune insuffisamment liée à
l’environnement, il est indispensable de remettre un minimum de sens
collectif à ces aides payées par les contribuables européens.
L’agriculture biologiques rend des services d’intérêt général
Ces aides au maintien que nous appelons, nous, producteurs bio et défenseurs de l’environnement, « aides à la reconnaissance des services environnementaux »,
permettent de rémunérer les services que nous rendons dans l’intérêt
général, à savoir la protection de l’eau des pollutions diffuses (pas de
pesticides, pas d’engrais azotés de synthèse), la protection de la
biodiversité cultivée et sauvage, l’entretien et le développement des
infrastructures écologiques (haies, fossés, mares, prairies
permanentes…), la protection du citoyen de la pollution de l’air par les
pesticides, la création d’emplois (+ 60% en bio) et enfin la fourniture
de produits sains…
Il faut donc garantir ces aides, les budgéter et les promouvoir pour
qu’elles accompagnent les producteurs dans leur conversion à la bio et
dans leurs recherche de démarches de progrès permanentes vers plus de
cohérence économique, écologique et sociale (fermes certifiées bio).
Nous demandons donc au gouvernement de trouver une solution à la
problématique budgétaire qu’il a créé lui-même, pour redonner de la
cohérence aux politiques publiques, pour faire de la prévention et pour
réduire les coûts environnementaux des pollutions agricoles (54
milliards d’euros de coûts pour la dépollution de l’eau) et 120 milliards de coûts, selon par une étude de la commission européenne sur les perturbateurs endocriniens causés par les pesticides).
Nous appelons les citoyens à se mobiliser pour une nouvelle agriculture.
En septembre 2015, l’association Nord
En Vie, Faites De La Nature et la mairie d’Aucamville invitait Jean-Paul
Jaud, cinéaste écologiste, pour un ciné-débat autour de son dernier
film « Libres ! » et du problème de l’énergie nucléaire.Nous en avons
profiter pour poser nos questions à cet esprit libre et surprenant, qui
fut un des pionniers de Canal+, et qui filmait le sport sur la chaine
cryptée avant de mettre son cinéma au service de la nature.
Jean-Paul Jaud passe sa vie à s’engager
dans la lutte pour la défense de l’environnement et de la nature. Le
cinéma lui doit de nombreux documentaires aussi beaux que documentés.
Après « Tous cobayes ! », qui s’attaquait aux OGM et au nucléaire, « Nos
enfants nous accuseront », qui mettait le projecteur sur les problèmes
de la production agricole et la nourriture dans les cantines scolaires,
il est venu présenter à Aucamville, son dernier film, « Libres ! », qui
questionne le nucléaire après Fukushima et se prend à rêver d’autonomie
énergétique.
La mobilisation de nos (futurs) collègues se poursuit face à la pénurie de stages qui met en péril leur formation. Après la mobilisation de Limoges,
c'est au tour des étudiants de Parmentier, CEMEA, IRFASE, ETSUP, CERP
et Montrouge de lancer un appel à manifester destiné aux étudiants,
formateurs et professionnels.
Une manifestation est prévue le jeudi 29 octobre à 15h00 à Jussieu (Cf tract ci dessous).
Pour
rappel, depuis plusieurs années, les étudiants des filières sociales
sont lourdement pénalisés par l’obligation qui est faite aux structures
accueillant des stagiaires de les gratifier lorsque leur durée de stage
est supérieure à 2 mois. La situation financière des établissements et
structures sociales et médico-sociales (pour la plupart financés par des
fonds publics) a conduit ces derniers à revoir leur position quant à
l’accueil de stagiaires, devenus de fait pour eux une dépense
supplémentaire. De la même manière dans les services publics, soumis à
la même obligation de gratification, les possibilités d’accès aux stages
ont été restreintes.
Déjà en formation d'assistante sociale, alors que j’étais toute jeune, fraiche et motivée, mon stage en polyvalence m’avait polyblasée.
J’avais
juré, craché, de jamais y bosser, et puis c’est arrivé. J’ai fini par
apprécier le travail, les collègues et contre toute attente j’y ai pris
goût et c’est ainsi que mon fessier s’est attaché puis est resté collé
au joli siège à roulettes du polybureau.
Aujourd’hui,
quelques années plus tard, ledit fessier a doublé de volume : en
polyvalence y’a quasi quotidiennement des couleuvres à avaler et t’as
vite fait d’apprendre à prendre un carré (une tablette) de chocolat pour
les faire passer, d’où polybourrelets.
Je suis polyfrustrée.
J’ai pas les moyens de soulager la plupart des souffrances que je
rencontre. Pas de travail, pas d’argent, ni de logement ou d’hébergement
et même plus le temps d’expliquer tout ça aux gens dignement. Je suis polydépourvue.
Mais
je donne le change : vous avez un problème ? J’ai 40 formulaires !
Quand vous n’avez pas un euro pour manger, pour 3 euros de photocopies
je peux tenter de vous obtenir une aide fi (ou pas). Je suis polycopiée.
Je
dis des conneries, souvent. J’suis mal payée pour expliquer aux gens
des dispositifs à la con que je comprends pas et des réalités que
moi-même, j’accepte pas. Je me voyais médiateur entre les usagers et
l’institution et me voilà devenue otage de l’administration. Je vois le
non sens, je sens l’arnaque, mais on me contraint par les sentiments,
par l’usager : c’est ainsi qu’aujourd’hui si je refuse de ficher le
pauvre je peux pas l’aider… Tout ça me polydésabuse.
On m’a dit merci et salope dans tellement de langues que je suis polyglotte.
On m’a bénit/maudit dans tellement de religions que la mienne est polythéiste.
Je suis polyvidée. On m’a polyutilisée.
Pour faire le boulot de la CAF, de pôle emploi et des autres, gérer la
merde de toutes les administrations/partenaires qui se sont désengagés.
Mon employeur a un mot d’ordre : solidarité. Alors je suis sommée d’être
solidaire et de gérer les tâches des collègues non remplacés. Tous les
collègues : de l’assistante sociale à la secrétaire, en passant par le
vigile en fin de contrat et la femme de ménage en congés mat’ (si,si). Polyvalente qu’ils disaient…
Jusque là j’ai (presque) accepté. J'ai même trouvé la force d'en rigoler. Mais aujourd’hui je suis polysaturée :
On me demande de faire le boulot d’autres services histoire de faire des économies et de pas y recruter.
On me demande de faire le travail des CRS histoire de mieux médiatiser les « évacuations » de migrants dans le quartier.
On
me demande d'oublier le secret pro, de donner mes infos d'abord aux
logiciels, ensuite à pôle emploi, et enfin au commissariat...
On
me demande de faire toujours plus avec toujours moins, c’est-à-dire
pour mes usagers toujours moins bien. Et là, je sens que je vais polycraquer.
Mon polylocal, c’est un château de cartes. Les collègues toutes plus polycrevées
les unes que les autres, s’oublient pour mieux se soutenir. On tire sur
la corde, on diffère son burn out le temps de soutenir ceux qui sont en
plein dedans. On le sait, on flippe, un jour tout ça va se polyébouler.
Mais quelque part, si je suis encore là c’est que j’ai des polykiffs.
Des belles rencontres, des jolis moments, des bouffées d’espoir. Des
petites réussites (le 115 qui décroche), des petites satisfactions (un
loyer presque entièrement payé) et des petits moments de grâce (un
sourire édenté). Et quand vient le vendredi soir, retrouver les
collègues autour d’un (quelques) verres, décompresser, décompenser,
refaire le monde et rigoler : rentrer polybourré(e)s.
Oui. C’est là que ça me polyblesse,
bordel : j’aime mon travail ! J’ai envie de me battre pour lui, pour
mon métier, pour les usagers du service public – de la polyvalence - qui
ont le droit aussi à du social (et pas qu’à de l’administratif).
J’ai encore de l’espoir. Des polyespoirs. J’ai encore la force d’être polyénervée.
Aujourd’hui assise, devant mon clavier. Demain, à Paris,
mi-novembre, debout devant l’Hôtel de Ville, à dire Non, à dire Merde, à
dire Stop. Y’a que si je faisais rien que j’aurais des regrets, alors
je suis polymotivée et j’espère que vous, collègues, vous (poly)suivrez !
Le
moustique OX513A sera peut-être le premier animal – ou plutôt insecte –
transgénique que vous rencontrerez dans la nature. Conçu par une
entreprise britannique, ce moustique OGM doit servir à lutter contre la
propagation de la dengue. Après des tests grandeur nature, le Brésil est
sur le point de donner son feu vert à sa commercialisation. Problème :
aucune étude indépendante n’a été réalisée pour mesurer les conséquences
de la production massive de cet insecte transgénique. Et son efficacité
contre la dengue est contestée.
Ce
n’est malheureusement pas un scénario de série B. Pour la première
fois, des animaux génétiquement modifiés vont être commercialisés en
milieu ouvert. Le Brésil est sur le point d’autoriser l’usage de
moustiques génétiquement modifiés. Le 10 avril, la Commission
brésilienne en charge des OGM (CNTBio) a approuvé, à 16 voix contre une,
la dissémination dans l’environnement du moustique transgénique Aedes aegypti commercialisé par l’entreprise britannique Oxitec [1].
Le nom de code de cette lignée de moustiques génétiquement modifiés est
OX513A. Pour les autorités brésiliennes, l’enjeu est de lutter contre
la dengue, une infection virale potentiellement mortelle transmise à
l’être humain par la piqûre de moustiques femelles. En 2013, 2,35
millions de cas de dengue, dont plus de 37 000 étaient des cas
d’infection sévère, ont été signalés sur le continent américain, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS).
D’après la société Oxitec, qui a déposé la demande de
commercialisation en juillet 2013, ces moustiques transgéniques
permettraient de « contrôler » la population des moustiques porteurs de
dengue en les rendant stériles. Des essais ont eu lieu dans plusieurs
villes du Brésil depuis 2011, notamment à Juazeiro dans l’État de Bahia
(nord-est du pays). 17 millions de moustiques mâles y ont été relâchés
en deux ans, selon un reportage vidéo de France 24.
C’est dans cette même ville qu’a été inaugurée à l’été 2012 l’usine
Moscamed, co-gérée par le ministère de l’Agriculture brésilien, qui
multiplie les œufs de moustique conçus par Oxitec. Du ministère de la
Santé aux sociétés Oxitec et Moscamed, les propos sont unanimes : les
lâchers de moustiques mâles génétiquement modifiés réduisent
drastiquement – de 79% à 90% – la population de moustiques sauvages au
bout de six mois.
Aucune étude indépendante
La technique utilisée par Moscamed consiste à insérer un gène
perturbateur dans des œufs de moustiques qui les rend dépendants à un
antibiotique, la tétracycline. Ce médicament est indispensable pour leur
croissance, explique Oxitec. L’usine Moscamed se charge de détruire les
œufs femelles et assure ne relâcher que les mâles qui ne peuvent pas
piquer, donc transmettre la dengue. Ces moustiques mâles génétiquement
modifiés sont censés s’accoupler dans la nature avec des femelles
« sauvages » et engendrer des descendants non viables, contribuant ainsi
à leur extinction progressive. « Ces moustiques, lâchés dans la
nature en quantité deux fois supérieure à celle des moustiques non
transgéniques, attireront les femelles pour copuler mais leur
progéniture n’atteindra pas l’âge adulte, ce qui devrait réduire la
population de l’Aedes aegypti », avance le ministère de la Santé brésilien.
Or, aucune étude indépendante n’a validé les données avancées par Oxitec. Pour de nombreuses organisations écologistes, « le
dossier est lacunaire. Aucun plan de suivi post-commercial n’est fourni
par l’entreprise, et les soi-disant "résultats probants" des essais en
champs (commencés en février 2011) n’ont pas été publiés », rappelle
l’association Inf’OGM. Les essais réalisés avec ce même moustique
génétiquement modifié, dans les îles Caïmans, ont également montré que
la technologie n’était pas si efficace, et qu’il faudrait plus de sept
millions de moustiques génétiquement modifiés stériles, par semaine,
pour avoir une chance de supprimer une population sauvage de seulement
20 000 moustiques [2].
Reproduction incontrôlée d’insectes OGM ?
N’y a t-il par ailleurs aucune chance que ces OGM, présentés comme « stériles », se reproduisent ? Selon un document confidentiel
rendu public par l’ONG anglaise GeneWatch – qu’elle a pu obtenir grâce
aux lois britanniques sur la liberté d’information –, les moustiques
génétiquement modifiés par Oxitec ne sont pas aussi stériles que prévu.
La tétracycline, le fameux antibiotique dont dépendent ces insectes, est
très largement présente dans les eaux usées et dans la viande issue
d’élevage industriel. « Or, les moustiques qui transmettent la dengue se reproduisent dans des environnements largement pollués par les eaux usées, souligne Christophe Noisette, d’Inf’OGM. En
présence de cet antibiotique, leurs progénitures ont un taux de survie
de 15 % environ et leur descendance sont capables d’atteindre l’âge
adulte ».
L’étude citée par GeneWatch mentionne aussi que les moustiques GM
peuvent survivre, même sans la présence de tétracycline, à hauteur de
3 %, ce qui rend impossible le contrôle de millions de moustiques lâchés
dans la nature. « C’est un défaut fondamental de la technologie d’Oxitec qui devrait donc arrêter ses expériences », réagit Helen Wallace, directrice de GeneWatch. Aux côtés d’autres organisations [3], GeneWatch exprime également sa crainte que le nombre de « moustiques-Tigre » (Aedes albopictus),
originaires d’Asie et également vecteurs de la dengue, n’augmente.
Cette espèce extrêmement invasive pourrait en effet occuper la niche
écologique laissée par l’élimination des moutisques Aedes aegypti. C’est sur la base de cette absence d’étude d’impacts indépendante qu’une pétition
a été lancée en Floride où la firme Oxitec avait prévu des essais à
ciel ouvert. La pétition a recueilli près de 130 000 signatures et
l’expérience dans cet Etat américain a été repoussée jusqu’à nouvel
ordre.
Du coté d’Oxitec, on assure que cette technique serait « réversible ». « Les moustiques sauvages reviennent lorsque l’on arrête de traiter la zone ».
Et c’est là une des clés financières pour Oxitec. Car les moustiques
OGM fonctionnent comme des insecticides : pour qu’ils soient efficaces,
il faut inonder les zones à traiter en permanence, ce qui implique une
production continue de millions de moustiques transgéniques. En bout de
course, des millions d’euros pour Oxitec qui a le monopole de cette
« technologie ». Et qui a d’ores et déjà breveté l’idée dans la plupart
des pays touchés par la dengue. Or, la moitié de la population mondiale
environ est exposée au risque d’après l’OMS. Il ne reste plus à Oxitec
qu’à attendre la confirmation de l’autorisation par l’Etat brésilien
avant de commencer à percevoir ses royalties.
Le moustique OX513A deviendra alors le premier animal OGM librement
commercialisé. D’autres animaux génétiquement modifiés ont déjà été
autorisés, comme des poissons transgéniques fluo, nommés Glofish et Night Pear, destinés à un usage décoratif en aquarium. Mais ils sont censés demeurer en milieu confiné. @Sophie_Chapelle
A lire, sur les animaux transgéniques : Ces animaux mutants que la cuisine génétique vous prépare
[2] Winskill
P, Harris AF, Morgan SA, et al. (2014) Genetic control of Aedes
aegypti : data-driven modelling to assess the effect of releasing
different life stages and the potential for long-term suppression.
Parasites & Vectors 7(1):68.
[3] Third World Network, AS-PTA, Red América Latina Libre de Transgénicos, GeneWatch UK
Boulets
aux pieds, habillés en bagnard, une cinquantaine de paysans se sont
symboliquement rendus à la direction des douanes, à Lyon, le 4 avril.
Dans leurs mains, des pains au levain, un plateau de fromages fabriqués
avec un ferment de ferme, une bouteille de vin vinifié à partir de
levures naturelles, un bidon de purin d’ortie... « La Loi sur les
contrefaçons, adoptée en février 2014, qualifie de potentielles
contrefaçons les produits que nous fabriquons à partir de matière
vivante, souligne la Confédération paysanne Rhône-Alpes. Tous ces
produits sont susceptibles de contenir des micro-organismes brevetés,
et donc d’être saisis et détruits par les douanes » (voir ce précédent article). « Je prends les consommateurs à témoins, lance Vincent Rouzé, secrétaire de la Confédération paysanne du Rhône et producteur de fromages. 80 %
des cultures dans le monde sont des cultures sauvages. Vous comprenez
bien l’intention des multinationales qui se cachent derrière la loi.
S’ils peuvent réussir à obtenir que c’est une contrefaçon d’utiliser une
semence indigène, c’est 100 % de la production mondiale qui est sous
contrôle et qui est payable ». Une semence ou une levure indigène ?
Ce sont des micro-organismes issus d’un milieu naturel, à distinguer des
levures et semences sélectionnées par des entreprises de
l’agro-industrie. « Le vin est un produit de terroir dans lequel il y a des micro-organismes qui n’ont besoin de personnes pour vivre, ajoute un vigneron du Beaujolais présent dans le cortège. En tant que paysans, nous ne faisons qu’accompagner la reproduction gratuite du vivant et cela est interdit. » Exception agricole générale
Tous les manifestants présents souhaitaient aussi marquer leur opposition à la logique du brevet sur le vivant. « La première personne qui a utilisé une mule ne l’a pas inventée mais a croisé un âne et un cheval, illustre Vincent Rouzé.
Les paysans font cela depuis des millénaires. On croise, on
sélectionne, ça fait la richesse du vivant. On organise
l’appauvrissement du vivant en les réservant à des industriels qui
auront le monopole. »« C’est inadmissible d’être hors la loi en faisant ce que nous avons toujours fait, lance Claire, jeune paysanne en polyculture-élevage dans le Sud-Isère. Nous refusons de devenir des bagnards ! »
Suite à l’occupation du Groupement national interprofessionnel des
semences, la Confédération paysanne a obtenu la sortie des semences de
ferme du champ d’application de la loi contrefaçon (voir cet article). « Mais nous exigeons plus, souligne la Confédération paysanne Rhône-Alpes. C’est l’ensemble du paquet agricole qui doit sortir de cette loi ». Alors que le Sénat examine le projet de Loi d’Avenir agricole à partir du 8 avril, plusieurs amendements
ont été proposés par le Collectif Semons la biodiversité qui regroupe
22 associations et syndicats, et promeut le respect absolu du droit des
agriculteurs de réutiliser et échanger ses semences, ses plants et ses
animaux. Mais aussi ses ferments, levains, levures et autres
préparations naturelles à base de micro-organismes... Une pétition est en ligne.
[Mise à jour le 22 juillet 2014] : suite à l’adoption définitive de
la loi d’avenir agricole, une partie des amendements du collectif Semons
la biodiversité a été retenue (voir ici).
Parmi les éléments gagnés par le collectif, il est à noter que les
préparations naturelles bénéficient enfin d’un statut spécifique
permettant leur utilisation et leur commercialisation suivant des
procédures allégées (notre article). Photo : CC Sophie Chapelle / Basta !
Alors
que certains se paluchent en exprimant leur haine de la France -
cinquième nation du monde - en racontant hoax sur hoax pour valider un
pseudo nationalisme et tenter de faire élire un parti qui n'a jamais
rien prouvé, ne prouvera jamais rien et dont les édiles se gaussent des
gueux qui votent pour eux ; l'émigration, qu'elle soit économique,
politique voire d'extrême urgence, reste le pois chiche sur le couscous
de beaufs qui ne comprennent rien à rien.
Les beaufs incultes et l’immigration
Ainsi,
pour ces moutons incultes : l’immigration est la base de leurs maux, de
leurs échecs, de leur propension à croire que, d’un côté l’État doit
tout leur permettre, mais que de l’autre, ils ne sont pas responsable de
lui. Bref ; entre inculture et déni de responsabilité : ces beaufs
préfèrent voter Front national plutôt que se mettre à bosser pour leur
pays. Par contre, tout mettre sur le dos d’une immigration à outrance
leur permet de se glander tranquillos. Sauf que... En France, il
n’existe pas d’immigration à outrance. Dommage pour eux. Ou pas.
Les demandes d’asile
En ce qui concerne les demandeurs
d'asile – c’est à dire des personnes ayant fui leur pays parce qu’elles y
ont subi des persécutions ou craignent d’en subir et qui sont en quête
d’une protection internationale – la France a enregistré 62800 demandes
d’asile en 2014, loin derrière les Etats-Unis (88400) ou d’autres pays
d’Europe comme l’Allemagne par exemple (202 700 demandeurs), la Suède
(81200) ou l'Italie (64600)1.
Et si on rapporte ce chiffre a la proportion de la population de chaque
État membre de l’UE, ce qui est plus significatif, les taux les plus
élevés de demandeurs ont été enregistrés en Suède (8,4 demandeurs
d’asile pour mille habitants), devant la Hongrie (4,3), l’Autriche
(3,3), Malte (3,2), le Danemark (2,6) et l’Allemagne (2,5). La France
n’arrive qu’en douzième position (1 demandeur d’asile pour mille
habitant).
La France est donc loin de “ployer” sous le poids des demandes comme on ne cesse de nous le répéter.
Les réfugiés
La France n’est pas non plus le pays qui
accorde le plus de statuts de réfugié (ce qui constitue l’aboutissement
“positif” de la demande d’asile) : en 2014, dans l’UE, 45% des demandes
d’asile ont été reconnues positives. Le taux d’accord en France pour
2014 était quand a lui de 28%3. Donc pour la France si génereuse, on
repassera.
Et si on regarde au niveau mondial, quel est selon vous, le pays qui accueille le plus de réfugiés ?
Ca doit être en Europe pour qu’on nous répète inlassablement que c’est
un si lourd fardeau ... Et bien non, figurez vous! C’est le Pakistan qui
arrive en tête des statistiques du HCR (l’Agence des Nations Unies pour
les réfugiés), avec 1,6 million de réfugiés, suivi de l’Iran avec 857
000 réfugiés et du Liban qui en compte 856 000.
Le Liban a, sur son sol, 178 réfugiés pour 1 000 habitants, ce qui,
rapporté à la France, donnerait quelque 12 à 15 millions... Or, on
estime à environ 165 000 le nombre de personnes disposant du statut de
réfugié politique en France (0,29% de la population). C’est une goutte
d’eau, nous sommes tout à fait en capacité de les accueillir.
Les pays en développement sont plus cohérents
Contrairement aux idées reçues, ce sont
les pays en développement qui reçoivent la majorité des personnes en
demande de protection – 90% des demandeurs d’asile et des réfugiés vont
dans des pays proches ou frontaliers, donc l’Europe n’est absolument pas
la zone du monde la plus affectée. Par rapport à la situation des
réfugiés syriens par exemple, l'exemple est flagrant.
Alors que le nombre de déplacés va
bientôt atteindre la barre des 4 millions, l'ONU a demandé que 30.000
d'entre eux soient « réinstallés » dans des pays occidentaux.
L’Allemagne a promis d’en accueillir 20000, la Suède 1200, la France,
devinez combien?........500. L’immense majorité de ceux-ci (97%)
s’installent au Liban, en Jordanie, en Turquie ou en Irak. Nous sommes
loin d’être envahis. Le monde entier ne rêve pas de rejoindre l'Europe.
Relisez les chiffres ci-dessus pour comprendre à quel point c’est faux.
De plus, on réduit le migrant à son
statut de migrant, comme si l’unique but de sa vie était de venir
frapper à notre porte, mais derrière chaque demande d’asile se cache un
homme ou une femme avec son histoire, son passé, un homme ou une femme
qui a grandi quelque part, a eu une enfance, a des attaches, un endroit
où il s’est senti chez lui. Je me souviens de ce Monsieur tchétchène qui
m’évoquait les larmes aux yeux les montagnes de son enfance, car jamais
il n’aurait pensé ne pas vieillir a leurs pieds ou de ce Monsieur
bangladais qui s’était effondré dans mon bureau car il venait
d’apprendre la mort de son père au pays et savait qu’il ne pourrait même
pas lui rendre un dernier hommage… Qui voudrait vivre ça ? Franchement,
qui ? Sans parler des trajets abominables pour atteindre l’Europe
tristement illustrés par les récents naufrages en Méditerranée…4
Les beaufs pensent que les immigrés viennent exclusivement pour les aides sociales
Vous pensez que quand on vient de pays
comme la Somalie ou L'Érythrée on vient parce que le système
d’allocations est plus avantageux en France que chez soi ? Il faut
arrêter la plaisanterie, imaginez un instant ce que cela représente de
tout quitter et vous comprendrez qu’on part parce qu’on n’a pas le
choix.
Vous voudriez vous, rester dans un Etat où règne la terreur, la guerre,
où vous avez peur chaque jour pour vos enfants ? Un Monsieur sri-lankais
que je suivais et qui dormait dehors faute de solution d'hébergement
m’a dit un jour “C’est très dur. Mais au moins ici je suis libre et je
n’ai plus peur en permanence.”
Renseignez-vous sur les régimes
politiques en Somalie ou en République Démocratique du Congo,
demandez-vous si vous resteriez en Syrie dans la situation actuelle. Ou
en Russie si vous êtes menacé de mort parce que vous avez écrit un texte
qui déplaît aux autorités. En Guinée où votre fille se ferait
potentiellement exciser comme vous dès le plus jeune âge.
L’espoir d’une vie meilleure est
équitablement partagé sur notre planête et ne nous est pas réservé parce
que nous sommes né du bon coté de la barrière.
Plus généralement, l'immigration est toujours présentée comme un
problème, alors même que de nombreuses études indiquent que
l’immigration est positive pour l’Etat français, en termes
démographiques, en termes de croissance, de savoir, de diversité et
qu’elle rapporte même de l’argent (12 milliards par an tout de même
selon une équipe de chercheurs de l’Université de Lille)5. C’est donc le
regard médiatico-politique sur les migrants qu’il faut réussir à
changer. Et ne pas céder aux discours populistes qui prospèrent à l’aune
de la montée du Front National qui trouve là un terrain fertile en ces
temps de récession économique.
1- Chiffres Eurostat
2- Chiffres Ofpra
3- Chiffres Ofpra
4- A ce propos, lire le magnifique livre de Fabrizio Gatti “Bilal sur la route des clandestins”, ed. Liana Levi, 2008.
Selon
un récent sondage Viavoice-BPCE-Les Echos, les Français placent
l'immigration au neuvième rang des préoccupations qu'ils veulent voir
abordées par les candidats à la présidentielle. Lo...
Parce
que je n'en peux plus d'entendre, à chaque fois que je dis que je
travaille dans l'accompagnement des demandeurs d'asile "Mais il sont
vraiment trop nombreux, non ?" "Déjà que la France es...
A
Trémargat, dans les Côtes d’Armor, la solidarité, l’entraide ou
l’écologie ne sont pas de vains mots. La petite commune bretonne est
depuis vingt ans un laboratoire à ciel ouvert de projets alternatifs.
Ses habitants soutiennent l’installation de paysans, s’approvisionnent
dans une épicerie de produits bio et locaux, se retrouvent au café
associatif, délibèrent au sein d’un conseil municipal qui applique des
principes de démocratie participative, et s’éclairent avec Enercoop. La
formule fonctionne : le village qui se mourait dans les années 70 est
depuis quinze ans en pleine renaissance. La preuve qu’on peut vivre
autrement. Reportage.
Un
samedi matin gris de novembre. Il pleut des cordes sur Trémargat, un
village des Côtes d’Armor, perdu au cœur du Kreiz-Breizh (Centre
Bretagne). Pourtant, sur la place centrale, une armée silencieuse a
adopté le ciré pour uniforme et, bravant les gouttes, ratisse, bine et
nettoie les parterres de fleurs. « On organise un chantier participatif pour terminer l’aménagement du bourg, explique Yvette Clément, la maire, une brouette à la main. Nous,
on s’occupe des espaces verts, et une autre équipe, installée sous un
hangar plus loin, construit six bancs en bois qui seront installés sur
la place. »
L’initiative est loin d’être une première : l’an dernier, le centre
du village a été totalement transformé grâce à la participation
d’habitants bénévoles. « C’est une idée du précédent conseil municipal, raconte Yvette, élue en mars dernier à la tête de cette commune de 180 habitants. Un
projet d’aménagement classique, bétonné, avait été proposé par un
cabinet. Cela aurait coûté 120 000 euros, soit la quasi totalité du
budget annuel. » La mairie choisit alors de faire appel aux bonnes volontés et de créer un théâtre de verdure, au cœur du village. « Les
paysans sont venus avec leurs tracteurs, les charpentiers ont construit
une pergola. C’est bien plus joli et cela n’a coûté que 12 000
euros ! »
Ce chantier est emblématique de la façon de fonctionner made in
Trémargat. Ici, l’adjectif participatif n’est pas un vain mot. Il est
appliqué à la lettre et décliné dans tous les domaines : politique,
culturel et économique. « On pratique la politique du colibri, résume Yvette, en faisant référence à Pierre Rabhi. Chacun fait sa part ! »
Tout le monde s’investit, au service de valeurs communes : l’écologie,
l’entraide, et la décroissance. Plus qu’une terre, les habitants
partagent une volonté de vivre ensemble, autrement.
Des agriculteurs néo-ruraux contre le modèle productiviste breton
C’est dans les années 70 que Trémargat s’est parée de ses couleurs
vertes. A l’époque, le centre Bretagne se vide de ses habitants, et la
commune, comme ses voisines, meurt à petit feu. Jusqu’à ce que plusieurs
jeunes agriculteurs néo-ruraux s’installent dans ce village pauvre, où
la terre est peu chère et disponible. Tous se revendiquent paysans et
croient en une agriculture raisonnée, à mille lieues du modèle
productiviste breton. Parmi eux, Yvette et son mari, qui ont repris une
bergerie de 40 hectares. « On est venus car il y avait des fermes pas chères, raconte-t-elle. On
a trouvé ici des agriculteurs qui étaient sensibles à ces questions, on
a commencé à réfléchir et travailler ensemble à des solutions
alternatives pour préserver l’environnement. »
Séduits par cet état d’esprit qui se diffuse doucement dans la
bourgade, de nouveaux venus les rejoignent au fil des ans. Potier,
artisans, coiffeur, restauratrice... posent leurs valises pour de bon.
Résultat, l’hémorragie démographique est stoppée. Depuis le début des
années 1990, la population s’est stabilisée et a considérablement
rajeuni, comptant aujourd’hui une trentaine d’enfants. Preuve du
dynamisme de Trémargat, la commune ne peut pas satisfaire toutes les
demandes de personnes souhaitant venir s’installer !
Des mandats limités dans le temps
Si le terreau était depuis longtemps favorable à l’éclosion de
projets alternatifs, il a fallu attendre 1995 pour qu’ils commencent à
être menés à grande échelle. Cette année-là, les « nouveaux » remportent
la mairie, tenue jusqu’alors par une famille « historique » du village.
Ils mettent en place une vraie démocratie participative à l’échelle
locale, avec la volonté de promouvoir l’écologie et la solidarité, deux
valeurs qui structurent leur mode de vie. Leur première décision est de
pratiquer la politique de la mairie tournante : le maire ne fait qu’un
seul mandat ! Surtout, il applique un programme décidé en commun avec
les habitants. « Avant les élections, quatre réunions publiques sont organisées, explique Mélanie, élue pour la première fois en mars. On
y fait le bilan du mandat précédent et on définit ensemble les
priorités du suivant. Ensuite, ceux qui le souhaitent se portent
volontaires pour constituer la liste. »
Les grands axes du programme sont donc élaborés par les habitants
eux-mêmes. L’élection passée (comme souvent dans les petites communes,
il n’y a qu’une liste), ceux qui le souhaitent – et ils sont nombreux –
restent impliqués, via les comités consultatifs constitués pour suivre
la mise en place de chacun des thèmes du programme. Nouvelle venue dans
la commune, Madeline, la vingtaine, formatrice en agro-écologie, est
bluffée par cette « vraie » démocratie participative : « C’est du bon
sens, c’est un fonctionnement que beaucoup de monde aimerait voir mis
en place sans y arriver. Mais ici ça marche, parce que tout le monde en a
envie et s’en donne les moyens. »
Mais attention, prévient Jennifer Corbeau, une jeune agricultrice élue au conseil, tout n’est pas idyllique : « Ça
ne se fait pas tout seul. Il y a des clashs, des désaccords, des débats
interminables, des projets qui n’aboutissent pas, des gens qui ne
participent pas. Mais dans l’ensemble ça fonctionne. Car la plupart des
gens vivent là, partagent un même état d’esprit et sont emportés par
cette dynamique collective. Ça donne envie de s’impliquer à son tour. »
« Des combines pour ne pas être désintégrés »
Se concerter, décider et agir ensemble : à Trémargat, c’est devenu un
réflexe. Avec pour leitmotiv, le refus de subir un développement dicté
par d’autres, comme le résume Yvette : « On nous taxe souvent de
marginaux, mais on fait partie du même système économique que tout le
monde. On trouve juste des combines pour ne pas être désintégrés et
garder la maîtrise. » Ainsi, quand le café – installé dans un
bâtiment racheté par la mairie – cherche un repreneur en 2008, une
poignée d’habitants décide de monter un projet de café associatif
alternatif. Un couple de candidats classiques se présente, mais les
Trémargatois ont envie d’en faire un lieu à leur image. Aujourd’hui, on y
boit et on y mange des produits bios, locaux et artisanaux. On y
organise des soirées jeux, des lectures, des concerts, des projections
de documentaires...
Géré par un bureau collégial de huit membres, le café associatif
fonctionne avec une quinzaine de bénévoles et deux salariés à mi-temps.
C’est le point de ralliement du village, son cœur. « C’est un lieu
de vie fondamental, peut-être encore plus ici qu’ailleurs, car il y a un
rapport et un attachement très forts au café, explique Aurélie, l’une des deux salariées. Le vendredi soir, c’est tout le temps plein. »
Ce midi aussi, le Trémargat café affiche complet. Une grosse marmite
de soupe attend les courageux du chantier participatif. Des gamins
courent partout, pendant que leurs parents ou des habitants plus âgés
discutent du chantier ou des derniers potins. Jennifer, accoudée au
comptoir, sourit : « Vous voyez, toutes les générations se mélangent, c’est toujours comme ça ici. Il y a une vraie volonté de vivre ensemble. »
80 000 euros de chiffres d’affaires pour l’épicerie du village
Au fond du bar, une porte s’ouvre sur un autre lieu clé du village :
l’épicerie. Là encore, elle a été pensée par et pour les habitants.
Quand elle apprend que ce bâtiment voisin du café va être mis en vente,
la mairie se montre intéressée. Et le projet de rouvrir une épicerie,
dix ans après la fermeture de la dernière du village, ressort des
cartons. Mais pas question de se lancer à l’aveugle. Une étude de marché
est menée pour déterminer ce qui est susceptible d’attirer des
acheteurs. « Surprise, la majorité des personnes sondées voulaient acheter des produits bio pas trop chers et du local »,
se souvient Vincent Munin, adjoint à la mairie et membre du collectif
gestionnaire. Le choix est donc fait : ce sera bio et local. Les
horaires d’ouverture sont choisis en fonction des demandes et
l’épicerie, gérée par une association, fonctionne elle aussi grâce aux
bénévoles. Un système d’abonnements, qui permet d’acheter à prix
coûtant, a été mis en place pour constituer une base de clients fidèles.
Et ça marche. Deux ans après son ouverture, l’épicerie, qui travaille
avec trente producteurs de la région et trois grossistes pour le bio,
rencontre même un succès qui dépasse toutes les attentes. Vingt-cinq
familles – soit un tiers des ménages de la commune – sont abonnées ; s’y
ajoutent une cinquantaine de clients plus ou moins réguliers, qui
viennent de Trémargat et des communes alentour. « On tablait sur un
chiffre d’affaires de 60 000 euros pour être à l’équilibre. On a fait
80 000 l’an dernier et en 2014, ce sera encore plus ! » L’épicerie renforce encore davantage le lien social. « C’est un lieu de vie supplémentaire, c’est important, analyse Vincent Munin. On y prend des nouvelles, les informations circulent. Pour ceux qui ne vont pas au café, c’est un moyen de socialiser. »
La première commune alimentée par Enercoop
Garder la maîtrise. Pour y arriver, Trémargat déploie tous les moyens
à sa disposition. Elle a ainsi établi un plan local d’urbanisme (PLU),
en 2006, pour imaginer le futur visage de Trémargat. Peu fréquent pour
une commune de cette taille, le document a permis de protéger les zones
humides et bocagères et de rendre constructibles une quarantaine de
parcelles dans des hameaux, afin de pallier au manque de foncier.
Surtout, il permet à la commune d’être plus autonome quant à ses choix
de développement. Trémargat est aussi la première commune française à
avoir choisi d’être alimentée en électricité par la coopérative de
l’énergie Enercoop
qui privilégie les énergies renouvelables. Du coup, la coopérative y a
installé son siège social breton. Malgré l’anticléricalisme d’un bon
nombre d’habitants, la commune a aussi accepté de gérer la rénovation de
l’église, financée à 90% par des subventions. Mais à une condition :
désacralisée, elle pourrait accueillir les associations. Un accord
inédit a même été signé entre le curé, la mairie et les associations
pour entériner la situation.
Mieux, Trémargat a décidé de peser sur l’orientation économique de la
commune. Sur les 14 fermes que compte le village, 12 sont aujourd’hui
adhérentes au Cedapa (Centre d’étude pour le développement d’une
agriculture plus autonome) qui promeut une agriculture durable. Pour
maintenir cet équilibre, la commune est déterminée à favoriser
l’installation d’agriculteurs écolos. Oui, mais comment faire,
puisqu’elle ne peut financer des projets privés ? Une solution est
trouvée : une Société civile immobilière (SCI) va être constituée, afin
de soutenir le projet d’installation de Jennifer et de son compagnon,
originaire de la commune. « On avait repris une ferme dans le centre
bourg on voulait acheter une parcelle pour faire paître nos brebis et
nos vaches allaitantes », raconte Jennifer. Le couple a trouvé une
parcelle idéale, sur une commune voisine, mais n’a pas les 60 000 euros
nécessaires, après avoir déjà beaucoup investi dans la ferme et la
création d’un laboratoire pour ses produits laitiers. La mobilisation a
sonné : la SCI va réussir à regrouper une centaine d’associés, dont la
commune, des particuliers, des associations. Et réunit les fonds pour
acheter le terrain. « C’est super de voir cet élan, raconte la jeune femme. On a des clients de Saint-Brieuc qui ont pris des parts. Un tel soutien, ça porte ! » Impliqué dans le projet dès sa création, Vincent Munin estime que la SCI est une arme importante : « Cela permet de pouvoir réagir rapidement et de mobiliser des fonds pour monter un projet. » La SCI pourrait prochainement racheter un local artisanal bientôt mis en vente. « On a pensé en faire une plateforme bois, explique Yvette Clément. Cela
serait assez cohérent puisque un groupe d’agriculteurs de la commune
lance un projet bois, destiné à voir comment protéger et valoriser au
mieux cette ressource de la région. »
Vers un projet d’éco-habitat intergénérationnel ?
Assise dans le café, la maire regarde l’avenir avec confiance et fait
le point sur les grands chantiers qui attendent Trémargat. « Dans le
programme commun, nous avons choisi de nous concentrer sur la
préservation des espaces naturels qui représentent 50% du territoire de
la commune. De créer un site internet, et d’entretenir et améliorer
encore le centre bourg. Nous avons aussi commencé à réfléchir à un
projet d’éco-habitat intergénérationnel. » D’autres idées sont dans
l’air, comme la création d’un atelier de mutualisation des services,
pour effectuer des réparations en commun ou partager les outils
nécessaires afin de préparer du jus de pomme.
Trémargat semble armée pour continuer à vivre comme elle l’entend.
Oubliée l’époque où ses voisins regardaient la commune d’un œil
circonspect. Devenue un modèle dans les cercles alternatifs, elle a peu à
peu gagné le respect du plus grand nombre. « On continue d’intriguer un peu, estime Yvette. Mais on a prouvé des choses. On ne nous voit plus comme des rêveurs, mais comme une commune qui se débrouille et qui innove. » Si d’autres communes pouvaient rêver et innover comme eux...
Marion Guyonvarch (texte et photos)
Sur le même sujet : Dans un village de la Drôme, la révolution participative est en marche ! Transition écologique : quand la France rurale revendique l’indépendance énergétique
Le
projet de loi Liberté de création, architecture et patrimoine voté en
première lecture à l’Assemblée, risque de promouvoir une liberté. Celle
de détruire. Les vieilles pierres. Les vieux jardins. Les vieux
quartiers. C'est un siècle et demi d’une législation protectrice,
lentement tissée de Prosper Mérimée à André Malraux et Jack Lang, que
Fleur Pellerin saccage. Il faut se méfier de la futilité. On se gaussait
de Fleur Pellerin, il serait peut-être temps de la redouter.
Lewis JOLY/SIPA
Il
faut se méfier de la futilité. On se gaussait de Fleur Pellerin. Même
Canal + moquait son inculture revendiquée devant les caméras. Un
ministre de la Culture qui ne lit pas. Et qui en pouffe de rire.
Insignifiance inoffensive, pensait-on. A tort. La frivolité ne fait pas
que des bulles. Elle peut détruire. Sans aucune mauvaise conscience.
C’est en bonne voie avec le projet de loi Liberté de création,
architecture et patrimoine voté en première lecture à l’Assemblée.
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Seul son bref article 1er – « La création artistique est libre » – a
fait l’objet de commentaires. Pour s’en amuser encore. Mais la
sociologue de la culture Nathalie Heinich y a vu plus que de la
démagogie : « Cette loi créerait une catégorie de citoyens à part, les
artistes ayant un privilège, une impunité juridique, ce qui poserait un
problème constitutionnel. » A l’appui de cet article 1er, Fleur Pellerin
a invoqué la polémique du Vagin de la reine d’Anish Kapoor, cette
installation qui a légalement vandalisé une partie du parc de
Versailles. Un indice. Ou un lapsus. Car le reste de sa loi promeut une
autre liberté. Celle de détruire. Les vieilles pierres. Les vieux
jardins. Les vieux quartiers. La mobilisation des professionnels du
patrimoine contre ce projet de loi désormais devant le Sénat a eu peu
d’écho. C’est pourtant un siècle et demi d’une législation protectrice,
lentement tissée de Prosper Mérimée à André Malraux et Jack Lang, que
Fleur Pellerin saccage.
Une législation contraignante qui explique que les centres
historiques soient préservés quand tant de maires ont défiguré les
entrées de ville. Un modèle copié par de nombreux pays. La loi de 1913
sur les « Monuments historiques ». Les « Secteurs sauvegardés » créés
par Malraux en 1962. Les « Zones de protection du patrimoine
architectural, urbain et paysager » mises en place par Lang en 1983. Ce
maillage subtil mais efficace d’outils juridiques pilotés par l’Etat est
ratatiné dans l’appellation unique de « Cité historique ». Laquelle est
intégrée au plan local d’urbanisme modifiable par les maires ! Les
collectivités locales deviennent maîtres d’ouvrage à la place de l’Etat.
Le regard lointain – l’Etat jacobin – a souvent mieux perçu la
qualité des joyaux historiques ou naturels que leurs voisins proches.
Leur survie doit beaucoup à ce classement national en surplomb contre
les tentations locales de destruction ou de marchandisation. Jusqu’ici,
rien ne pouvait être touché sans l’accord des 200 architectes des
Bâtiments de France. Bien que débordés par le travail et les pressions
des élus, ces emmerdeurs
l’emportaient grâce à l’autorité et aux moyens de l’Etat. La loi
Pellerin leur coupe les pattes. Leur accord n’est plus nécessaire pour
modifier les protections.
Il y a des maires conscients de l’intérêt de cette protection
nationale. Eux savent ce qu’investissait l’Etat en interventions de
professionnels enviés dans le monde entier pour identifier et délimiter
les protections, opérer les restaurations. Ils sont affolés par cette
liquidation. Une conséquence de ce grand transfert de charges de l’Etat
endetté aux collectivités locales. « On nous abandonne ! » s’indigne
Gérard Duclos, maire PS de Lectoure et responsable de l’Association
nationale des villes et pays d’art et d’histoire. Débrouillez-vous, leur
répond Fleur Pellerin, qui achève ce que Nicolas Sarkozy avait commencé
avec les « Aires de mise en valeur de l’architecture et du
patrimoine », qui réduisaient déjà le rôle des architectes des bâtiments
de France. Mettez en valeur. Faites de l’argent avec vos vieilles
pierres. Louez. Vendez.
Tout se combine dans ce moment Pellerin. La crise des finances publiques. La haine de l’Etat national. La haine du passé.
La ministre a consacré les dernières Journées du patrimoine au
« patrimoine du XXIe siècle ». « Le patrimoine en train de se faire :
les créations architecturales et paysagères de ces quinze dernières
années. » Pour « être aux côtés des créateurs du présent ». Elle se
conforme aux conseils que lui donne François Hollande dans une
pathétique scène du documentaire d’Yves Jeuland tourné à l’Elysée. Le
président lui intime l’ordre d’aller « au spectacle » : « Tous les
soirs, il faut que tu te tapes ça. Et dis que c’est bien, que c’est
beau. Ils veulent être aimés. » Les cultureux votent encore à gauche.
Les vieilles pierres ne servent à rien. Les professionnels du patrimoine
sont largués. Fleur Pellerin ne les écoute pas. Mais leur fait la
leçon. « Aujourd’hui, il faut repenser l’accès aux arts et à la culture à
l’aune des nouvelles générations, en partant de leurs codes, de leur
désir d’expression. S’appuyer sur leurs pratiques culturelles
spontanées », explique la ministre, citant « ceux qui graffent sur les
murs ».
Elle n’écoute même pas Jack Lang, qui, trahi, s’énerve : « J’ai créé
les Journées du patrimoine pour que les Français s’approprient ce bien
collectif. L’Etat doit être pleinement préservé dans le maintien de ses
responsabilités, scientifiques, techniques, juridiques, culturelles. Il
faut un Etat volontaire. » L’ancien ministre s’applique à donner des
exemples de ce qui ne sera plus possible avec la loi Pellerin. Comme son
classement autoritaire, contre le maire, des halles du Boulingrin de
Reims, premier voile de béton au monde (1929), aujourd’hui centre
d’attraction de la ville. Mais Lang, ce moderne qui respectait le passé,
est un ancien combattant pour Fleur Pellerin. Trop forte : elle zappe
Malraux et fait passer Jack pour un réac.
Valdis
Dombrovskis, le vice-président de la Commission européenne en charge de
l’euro, arrive ce lundi à Athènes dans un climat quelque peu détérioré.
Valdis Dombrovskis, le vice-président de la
Commission européenne en charge de l’euro, arrive ce lundi à Athènes
dans un climat quelque peu détérioré. Après le sommet électrique du 13
juillet qui avait débouché dans la douleur sur un nouveau plan d’aides
de 86 milliards d’euros sur trois ans à la Grèce, Alexis Tsipras, le
Premier ministre, avait pourtant joué au bon élève. Au point que tous
ses partenaires, pourtant très critiques quelques semaines auparavant,
fassent son éloge.
Mais plusieurs incidents
récents viennent assombrir ce tableau. Il y a d’abord les réformes que
la Grèce doit lancer rapidement pour obtenir une nouvelle tranche
d’aides de 2 milliards d’euros. « Il n’y a pas une minute à perdre », a
averti Valdis Dombrovskis dans une interview publiée dimanche dans le
journal « To Vima ». La visite de la Troïka la semaine dernière a semblé
montrer que le gouvernement grec a pris du retard en la matière. Alexis
Tsipras s’est ainsi ému de demandes de ses partenaires touchant les
plus démunis, refusant notamment de faciliter les saisies immobilières
pour les ménages endettés comme les créanciers ont pu le demander.
Autre point de
frictions qui devrait être abordé lors de la visite de Valdis
Dombrovskis, le limogeage surprise par le gouvernement grec de sa
secrétaire générale aux Recettes publiques la semaine dernière. Cette «
Madame fiscalité », Katerina Savvaïdou, a été poussée vers la sortie sur
des soupçons d’avantages indus accordés à des chaînes télévisées (via
des délais de paiement) ainsi qu’à une entreprise soupçonnée de fraudes
fiscales. Dans un pays où la non-collecte de l’impôt est un mal
endémique, cette mesure énergique peut sembler se justifier. Mais elle a
aussi fait ressurgir le spectre d’un retour de l’interventionnisme
politique dans la gestion de l’administration. Katerina Savvaïdou avait
en effet été nommée par le prédécesseur d’Alexis Tsipras, Antonis
Samaras. Bruxelles devrait du coup demander des clarifications, alors
que cette main du politique a souvent été désignée comme une cause du
mauvais fonctionnement de l’administration grecque
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http://www.lesechos.fr/monde/europe/021430047373-ca-se-passe-en-europe-les-tensions-entre-la-grece-et-ses-creanciers-reapparaissent-1169233.php?EPUPTbv0aGsaACQc.99#xtor=CS1-31