Le Monde Eco
et entreprise
jeudi 13 novembre 2014, p. SCQ5
jeudi 13 novembre 2014, p. SCQ5
La consommation mondiale d'énergie va croître de 37 % d'ici à 2040
Face au risque
climatique, l'Agence internationale de l'énergie
presse les Etats de « ramener le système énergétique
sur une voie plus sûre
»
Par Denis Cosnard
Il y a une bonne
et une mauvaise nouvelle dans le grand rapport
prospectif, publié, mercredi 12
novembre, par l'Agence internationale de l'énergie (AIE), qui se
projette pour la première fois
jusqu'en 2040.
La bonne :
aucune pénurie ne se profile. A cet horizon, le
cocktail énergétique mondial
sera composé à parts égales de pétrole, de gaz, de
charbon et d'énergies vertes
ou peu carbonées, selon l'AIE. Et pour chacune de ces
énergies, durant ces
vingt-cinq ans, écrivent les experts de l'Agence, qui
dépend de l'Organisation
de coopération et de développement économiques (OCDE).
« les ressources ne
constituent pas une contrainte »
Pas de choc
pétrolier ni gazier à prévoir, donc, notamment grâce à
l'essor du pétrole et du
gaz de schiste.
La mauvaise
nouvelle, maintenant. Du fait en partie de cette
ressource relativement
abondante, mais aussi des 2 milliards d'humains
supplémentaires attendus sur
terre, la consommation
mondiale d'énergie va
encore s'accroître de 37 % d'ici à 2040.
Une hausse
cohérente avec les dernières prévisions d'ExxonMobil
(+ 35
%).
En conséquence,
les émissions de gaz à effet de serre vont continuer à
grimper, et la
température sur terre va augmenter à terme de 3,6
degrés en moyenne. Un scénario
catastrophique.
La hausse des
températures envisagée est en effet bien supérieure à
l'objectif international
de limiter le réchauffement mondial à 2 degrés. Ce
seuil franchi, les événements
climatiques extrêmes risquent de se multiplier, et le
niveau de la mer menace de
s'élever dangereusement.
écrivent les
experts de l'AIE. « Cet objectif de 2 degrés
requiert des actions urgentes
afin de ramener le système énergétique sur une voie
plus sûre »
,
Un message
d'alerte, en quelque sorte, alors que de délicates
négociations internationales
sur le changement climatique sont en cours, dans
l'espoir d'aboutir à un accord
lors de la conférence prévue par l'ONU à Paris en
décembre
2015.
La croissance
mondiale, pourtant,
devient d'année en année
moins vorace en énergie,
souligne Fatih Birol,
économiste en chef de l'AIE et principal auteur du
rapport.
Un exemple? Les
voitures. Les trois quarts d'entre elles sont
désormais soumises à des normes en
matière de consommation,
note l'AIE. Résultat,
alors que le nombre d'automobiles et de camions
circulant dans le monde devrait
plus que doubler d'ici à 2040, les besoins en
carburant n'augmenteront en
principe que d'environ 25 %.
Ces efforts
d'efficacité énergétique devraient permettre
d'économiser 23 millions de barils
de pétrole par jour à l'horizon 2040, se réjouit
l'agence. « plus que la
production actuelle cumulée de l'Arabie saoudite et
de la Russie »
,
Développement
du
nucléaire
Même logique
pour le gaz naturel, où les mesures prises pour
limiter la consommation
dans les centrales électriques et
l'industrie sont supposées gagner 940 milliards de
mètres cubes par an, «
davantage que ce que produit aujourd'hui l'Amérique
du Nord »
.
Autre point
décisif pour limiter le réchauffement climatique :
l'essor des énergies
renouvelables et du nucléaire. Près de la moitié de la
hausse de la production
électrique attendue d'ici à 2040 devrait être couverte
par les énergies vertes,
estime l'AIE.
Au niveau
mondial, la part des éoliennes et des panneaux
solaires dans l'électricité
devrait quadrupler. Dans l'Union européenne, l'éolien
pourrait, à lui seul,
fournir 20 % des besoins, contre 7 % en 2013.
Malgré
Fukushima, le nucléaire serait aussi amené à se
développer. Dans l'hypothèse
centrale de l'AIE, la puissance installée dans le
monde bondit même de 60 % en
vingt-cinq ans!
Une résurrection
due à une poignée de pays où l'Etat soutient fermement
l'atome, à commencer par
la Chine, l'Inde, la Corée et la Russie. Ou encore
l'Iran.
Mardi, la
République islamique a d'ailleurs signé un accord avec
Moscou, qui doit l'aider
à construire deux nouveaux réacteurs à Bouchehr, sur
la côte du golfe Persique.
A terme, l'Iran veut bâtir vingt centrales. En Europe,
le nucléaire déclinerait
en revanche de 10 %.
En dépit des
efforts de sobriété et du recours accru aux énergies
propres, la consommation
mondiale
et les émissions de gaz à effet de serre devraient
continuer leur inquiétante
progression. En particulier en Asie, qui assurerait
seule 60 % de la
hausse.
La Chine devrait
d'ailleurs devenir le premier pays consommateur de
pétrole au début des années
2030, devant les Etats-Unis. Une couronne dont Pékin
se passerait
bien.
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