jeudi 8 janvier 2015

DÉSOBÉIR, C’EST VIVRE

Fusillade-massacre à Charlie Hebdo ce 7 janvier 2015.



La fusillade qui a fait plusieurs morts à la rédaction de Charlie Hebdo confirme l’atmosphère liberticide qui, sous de multiples formes, menace actuellement la désobéissance, notamment sacrilège et satirique.

Dans l’hexagone, jour après jour, l’espace se réduit entre, d’une part, des intégristes religieux de tous bords qui descendent dans la rue, les uns après les autres, et menacent diversement nos libertés chèrement conquises et, d’autre part, une extrême-droite qui gagne du terrain et se prétend le rempart contre ce fléau, alors qu’elle est toute aussi nauséabonde et dangereuse.

La confusion ambiante atteint des sommets et chaque nouvelle étape suggère de choisir entre la peste et le choléra, dans la mise en scène d’une guerre de civilisation complètement imaginaire qui contribue à fabriquer la peur, les préjugés et le repli sur soi.

Malgré les circonstances, certains prétendent, en France, que l’anticléricalisme et l’antifascisme sont désuets et passés de mode. C’est faire peu de cas de l’Histoire qui nous a montré que les fantômes meurtriers des intégrismes religieux et de la nébuleuse fasciste tentent régulièrement de faire leur retour.

La laïcité n’est pas un combat d’arrière-garde, ni l’humanisme et l’antiracisme des vieilles lunes au service de quelque pouvoir.

Ce sont des luttes plus que jamais actuelles, qui sont absolument indissociables de celles qui nous opposent à un gouvernement violent et criminel à l’égard de celles et ceux qui désobéissent sur les ZAD et partout ailleurs à ses politiques autoritaires, inégalitaires et destructrices.

Ces luttes sont plus importantes et complémentaires que jamais. Et la désobéissance ne se négocie pas. Même si elle n’est pas du goût de tout le monde. Car désobéir, c’est vivre. Désobéir, c’est défendre le droit de choisir nos vies par-delà les idéologies mortifères qui nous menacent. Désobéir, c’est défendre la vie, parfois jusqu’à en mourir.

Même si je ne partageais pas toujours l’humour et les positions de mes confrères de Charlie Hebdo, notamment dans les conflits qui ont opposé certains d’entre eux à mon ami Siné, j’ai une pensée pour toutes les victimes et leurs proches, notamment mon ami Tignous.

Même décédées, ces personnes restent néanmoins plus vivantes, à travers les décénnies de créations qu’elles nous laissent, que les partisans d’idéologies mortifères qui les ont assassinées.


Yannis Youlountas, membre du comité de rédaction de Siné Mensuel,
écrivain et réalisateur

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