Source : Politis
À Paris, des associations ont organisé ce jeudi un happening de rentrée pour exiger la scolarisation et la mise à l'abri des jeunes mineurs isolés arrivés en France.
À Paris, des associations ont organisé ce jeudi un happening de rentrée pour exiger la scolarisation et la mise à l'abri des jeunes mineurs isolés arrivés en France.
Assis
à même le sol, dans un français encore hésitant, une trentaine de
mineurs étrangers répètent les vers entonnés par une jeune enseignante
bénévole : « Sur mes cahiers d’écolier / Sur mon pupitre et les arbres / Sur le sable sur la neige / J’écris ton nom » (« Liberté », Paul Eluard).
Sur des bureaux imaginaires, dans une salle de classe dont les murs sont tracés à la craie, la petite assemblée s’invente sa rentrée scolaire. Jeudi 1er septembre, comme eux, des centaines de jeunes mineurs isolés étrangers (MIE) ont été privés de leur droit à l’éducation. Associations et collectifs (BAAM, ADMIE, ADJIE, RESF, CDERE) se sont mobilisés sur le parvis de la mairie de Paris afin d’alerter les pouvoirs publics. Présidente du Bureau d’accueil et d’accompagnement des migrants (BAAM), Héloïse Mary et ses collègues voulaient une manifestation qui sorte de l’ordinaire. « Un message fort pour affronter le problème », et sortir de l’inertie gouvernementale.
Un rapport est ensuite rédigé et transmis au département de Paris qui adresse une lettre au jeune en question. Le problème ? Près de 80% des personnes se présentant à cette évaluation sont refusées. Les raisons invoquées ? Renaud Mendel, président de l’association pour la défense des mineurs isolés étrangers en connaît quelques-unes : « Acte de naissance qui ne peut pas être rapporté à votre personne » ou encore « caractère lacunaire et imprécis de votre récit » sont autant de justifications permettant la non-prise en charge de ces personnes par l’aide sociale à l’enfance.
Si des recours sont possibles, ils n’en demeurent pas moins que les jeunes restent vulnérables le temps de mettre en œuvre les procédures, particulièrement longues sur Paris. Au sein d’une permanence d’accompagnement, l’ADJIE, Renaud Mendel suit certains de ces enfants et adolescents dans leurs démarches administratives.
L'un d’eux, également présent ce jeudi pour assister à la classe en plein air, a été pris en charge par l’aide sociale à l’enfance durant huit mois. Mais le département a fait appel de la décision prononcée par le juge des enfants, qui avait placé l’adolescent de 16 ans. « Nous avons fait appel de cette décision, explique Renaud Mendel, mais son acte de naissance n’a pas été considéré comme authentique. » Au mois de mai, le jeune garçon s'est retrouvé à la rue. Désormais, il dort dans un foyer malien. Loin d'être un cas unique, beaucoup d'enfants et d'adolescents vivent dehors ou sont hébergés par quelques personnes solidaires.
Mais ce que critique véritablement Renaud Mendel, c’est le fait qu’un enfant privé de prise en charge par l’ASE soit en plus privé de son droit à la scolarisation. Une décision actée par « le ministère de l’Éducation nationale qui a donné des directives pour que le CASNAV », qui a justement pour mission d'accompagner la scolarisation des élèves nouvellement arrivés en France, « ne donne plus d’affectation scolaire à des mineurs qui ne sont pas pris en charge par l’ASE ».
Devant le tableau blanc, Renaud Mendel, choisit lui de lire les propos de Jacques Toubon, Défenseur des droits. Un rapport rendu en juillet et dans lequel il « réitère sa recommandation selon laquelle les jeunes migrants doivent être scolarisés dès leur accueil temporaire, et que cette scolarisation doit être une priorité absolue tant pour les services de l’aide sociale à l’enfance que pour les services du CASNAV en charge des affectations scolaires à Paris. » Pour Renaud Mendel, les déclarations du Défenseur des droits démontrent « que le droit n’est pas respecté » en France et que la scolarisation est indispensable à ces mineurs pour « la construction de leur avenir ».
Autour de ces revendications, des moments de détente sont aussi organisés. Petit concert et discussions, la manifestation statique attire les curieux qui viennent se renseigner sur ces problématiques. Non loin de là, un emploi du temps concocté par les associations organisatrices de l’événement est disponible et distribué aux passants. Il ne laisse aucun doute sur le quotidien enduré par ces jeunes mineurs isolés :
Lundi matin, c’est conjugaison. L’élève apprendra à conjuguer « être présumé mineur » au conditionnel. L’enseignant ? « Aide social à l’enfance ». Après une pause déjeuner sans déjeuner, le mineur apprendra à compter grâce aux piqûres de punaises après une nuit dans un hôtel social. Mardi matin, la police nationale se reconvertit en professeur de sport, tandis que l’élève devra « être poursuivi et arrêté dans les rues de Paris ». Un emploi du temps bien rempli qui laisse peu de chances à un enseignement digne et efficace.
Si celui-ci a été rédigé dans l’intention de faire réagir les passants, il n’en est pas moins inspiré de faits réels. « Les hôtels sociaux sont vraiment infestés de punaises de lit », assure l’une des bénévoles du BAAM qui ajoute néanmoins que les nuits d’hôtels sont rarement proposées. Les jeunes se retrouvent alors dans la rue, sans protection.
Sur des bureaux imaginaires, dans une salle de classe dont les murs sont tracés à la craie, la petite assemblée s’invente sa rentrée scolaire. Jeudi 1er septembre, comme eux, des centaines de jeunes mineurs isolés étrangers (MIE) ont été privés de leur droit à l’éducation. Associations et collectifs (BAAM, ADMIE, ADJIE, RESF, CDERE) se sont mobilisés sur le parvis de la mairie de Paris afin d’alerter les pouvoirs publics. Présidente du Bureau d’accueil et d’accompagnement des migrants (BAAM), Héloïse Mary et ses collègues voulaient une manifestation qui sorte de l’ordinaire. « Un message fort pour affronter le problème », et sortir de l’inertie gouvernementale.
Dénoncer une « maltraitance institutionnelle »
« Comme toutes structures de ce type, nous préfèrerions ne pas exister et que ces jeunes soient pris en charge », soupire Héloïse Mary. Mais aujourd’hui, la jeune femme est venue pour dénoncer la « maltraitance institutionnelle » dont sont victimes les MIE :Quoi de mieux que le jour de la rentrée scolaire pour venir interpeller les pouvoirs publics et la mairie de Paris de leurs manquements ? Leur rôle est de les mettre à l’abri et de protéger les publics vulnérables, et donc les mineurs isolés. Mais ils dorment sur des trottoirs !En France, lorsqu’un mineur arrive de l’étranger sans parent ni accompagnateur, celui-ci doit être pris en charge par l’aide sociale à l’enfance (ASE). Cela dit, il doit d’abord prouver sa minorité et son isolement. Deux choses évaluées par des personnes « compétentes » au service du dispositif d’évaluation des mineurs isolés étrangers (DEMIE).
Un rapport est ensuite rédigé et transmis au département de Paris qui adresse une lettre au jeune en question. Le problème ? Près de 80% des personnes se présentant à cette évaluation sont refusées. Les raisons invoquées ? Renaud Mendel, président de l’association pour la défense des mineurs isolés étrangers en connaît quelques-unes : « Acte de naissance qui ne peut pas être rapporté à votre personne » ou encore « caractère lacunaire et imprécis de votre récit » sont autant de justifications permettant la non-prise en charge de ces personnes par l’aide sociale à l’enfance.
Si des recours sont possibles, ils n’en demeurent pas moins que les jeunes restent vulnérables le temps de mettre en œuvre les procédures, particulièrement longues sur Paris. Au sein d’une permanence d’accompagnement, l’ADJIE, Renaud Mendel suit certains de ces enfants et adolescents dans leurs démarches administratives.
L'un d’eux, également présent ce jeudi pour assister à la classe en plein air, a été pris en charge par l’aide sociale à l’enfance durant huit mois. Mais le département a fait appel de la décision prononcée par le juge des enfants, qui avait placé l’adolescent de 16 ans. « Nous avons fait appel de cette décision, explique Renaud Mendel, mais son acte de naissance n’a pas été considéré comme authentique. » Au mois de mai, le jeune garçon s'est retrouvé à la rue. Désormais, il dort dans un foyer malien. Loin d'être un cas unique, beaucoup d'enfants et d'adolescents vivent dehors ou sont hébergés par quelques personnes solidaires.
Mais ce que critique véritablement Renaud Mendel, c’est le fait qu’un enfant privé de prise en charge par l’ASE soit en plus privé de son droit à la scolarisation. Une décision actée par « le ministère de l’Éducation nationale qui a donné des directives pour que le CASNAV », qui a justement pour mission d'accompagner la scolarisation des élèves nouvellement arrivés en France, « ne donne plus d’affectation scolaire à des mineurs qui ne sont pas pris en charge par l’ASE ».
« Sans scolarité, sans hébergement, à la merci des dangers de la rue »
Dans l’après-midi, les ateliers se succèdent. « On apprends aux élèves ce qu’est la laïcité ou ce qu’est l’école de la République… en espérant qu’ils y auront accès un jour », sourit Héloïse Mary. Quelques jeunes mineurs prennent la parole, racontent d’où ils viennent et pourquoi ils souhaitent être scolarisés. Des pancartes de mobilisation sont fabriquées et les associations dénoncent publiquement les difficultés auxquelles sont confrontés les jeunes mineurs et l'absence de considération des pouvoirs publics.Devant le tableau blanc, Renaud Mendel, choisit lui de lire les propos de Jacques Toubon, Défenseur des droits. Un rapport rendu en juillet et dans lequel il « réitère sa recommandation selon laquelle les jeunes migrants doivent être scolarisés dès leur accueil temporaire, et que cette scolarisation doit être une priorité absolue tant pour les services de l’aide sociale à l’enfance que pour les services du CASNAV en charge des affectations scolaires à Paris. » Pour Renaud Mendel, les déclarations du Défenseur des droits démontrent « que le droit n’est pas respecté » en France et que la scolarisation est indispensable à ces mineurs pour « la construction de leur avenir ».
Autour de ces revendications, des moments de détente sont aussi organisés. Petit concert et discussions, la manifestation statique attire les curieux qui viennent se renseigner sur ces problématiques. Non loin de là, un emploi du temps concocté par les associations organisatrices de l’événement est disponible et distribué aux passants. Il ne laisse aucun doute sur le quotidien enduré par ces jeunes mineurs isolés :
Lundi matin, c’est conjugaison. L’élève apprendra à conjuguer « être présumé mineur » au conditionnel. L’enseignant ? « Aide social à l’enfance ». Après une pause déjeuner sans déjeuner, le mineur apprendra à compter grâce aux piqûres de punaises après une nuit dans un hôtel social. Mardi matin, la police nationale se reconvertit en professeur de sport, tandis que l’élève devra « être poursuivi et arrêté dans les rues de Paris ». Un emploi du temps bien rempli qui laisse peu de chances à un enseignement digne et efficace.
Si celui-ci a été rédigé dans l’intention de faire réagir les passants, il n’en est pas moins inspiré de faits réels. « Les hôtels sociaux sont vraiment infestés de punaises de lit », assure l’une des bénévoles du BAAM qui ajoute néanmoins que les nuits d’hôtels sont rarement proposées. Les jeunes se retrouvent alors dans la rue, sans protection.
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