vendredi 29 janvier 2016

Qui est riche et qui est pauvre en France ?

26 janvier 2016 - Quels sont les seuils de pauvreté, de richesse et le niveau de vie en France ? L’Observatoire des inégalités publie les toutes dernières données.

A quel niveau de revenu cesse-t-on d’être pauvre ou devient-on riche ? Délimiter des frontières de niveaux de vie est essentiel pour qui veut comprendre la société. Un travail subjectif, mais qui permet de lancer un débat. Nous publions des données détaillées de l’année 2013 par type de ménage (voir encadré méthodologique).
Les frontières des niveaux de vie
Limite des niveaux de vie mensuel selon le type de famille
Unité : euros

Seuil de pauvreté : 50 % du revenu médian Limite entre les catégories populaires (30 % inférieurs) et moyennes Revenu médian (seuil de 50 %) Limite entre les catégories moyennes et aisées (20 % supérieurs) Seuil de richesse : double du revenu médian
Personnes seules7601 2391 5212 2313 042
Familles monoparentales9981 6131 9952 8933 990
Couples sans enfant1 4762 3712 9524 4105 903
Couples avec un enfant1 7642 8793 5284 9967 055
Couples avec deux enfants1 9303 1893 8595 5567 718
Couples avec trois enfants ou plus1 9313 0493 8625 7287 723

Ensemble1 1321 7432 4624 0994 924
Après impôts et prestations sociales.
Source : Insee - Données 2013 - © Observatoire des inégalités
Qui est considéré comme pauvre ?
Si l’on retient le seuil de pauvreté à 50 % du niveau de vie médian, une personne seule est considérée comme pauvre si elle vit avec moins de 760 euros par mois (données 2013). Un couple sans enfant avec 1 476 euros et 1 930 euros avec deux enfants. Le seuil de pauvreté le plus souvent utilisé par l’Insee est situé à 60 % du niveau de vie médian, soit 1 000 euros mensuels [1].
Qui appartient aux catégories populaires ?
Si l’on définit les catégories populaires comme les 30 % du bas de l’échelle des revenus, elles perçoivent par mois au plus 1 239 euros pour une personne seule, 2 371 euros pour un couple sans enfant et 3 189 euros pour un couple avec deux enfants. Pour un célibataire, ce niveau est proche du Smic pour un temps plein, auquel il faudrait enlever les impôts et ajouter d’éventuelles allocations. Ce seuil est sans doute restrictif. S’il semble bas à certains, c’est qu’il intègre les personnes qui touchent des minima sociaux, qui sont en temps partiel, au chômage, qui n’ont travaillé que quelques mois dans l’année ou qui touchent des petites retraites. Il ne s’agit pas des revenus des actifs à temps plein.
Qui fait partie des classes moyennes ?
Selon la définition que nous utilisons, les classes moyennes comprennent la moitié de la population, des 30 % les plus pauvres aux 20 % les plus riches. Soit un niveau de revenu de 1 239 à 2 231 euros mensuels pour un célibataire, de 2 371 à 4 410 euros pour un couple sans enfant et de 3 189 à 5 556 euros pour un couple avec deux enfants. Des données très éloignées des « classes moyennes » dont on parle souvent dans le débat public, et dont les revenus sont très supérieurs à la moyenne, ce qui fait perdre du sens à ce concept.
Qui est aisé ?
On qualifie d’« aisés » ceux qui se situent parmi les 20 % les plus riches. Ils disposent d’un niveau de vie supérieur à 2 231 euros mensuels pour un célibataire, à 4 410 euros pour un couple sans enfant et à 5 556 euros pour un couple avec deux enfants. Avec 3 000 euros de niveau de vie par mois après impôts, un célibataire vit bien mieux que le reste de la population, il est objectivement à l’aise. Mais il ne gagne pas grand chose s’il se compare aux 1 % les plus riches : les inégalités sont grandes au sein des tranches supérieures. Question de perspective.
Et les riches ?
Nous considérons comme « riche » une personne seule qui touche plus de 3 042 euros par mois, un couple sans enfant qui vit avec plus de 5 903 euros, et un couple avec deux enfants au-delà de 7 718 euros. Notre seuil est fixé au double du niveau de vie médian. Cette norme n’est ni plus ni moins subjective que celle qui fixe le seuil de pauvreté. Fixer un seuil de richesse déclenche généralement un tollé. A 3 000 euros mensuels, on est très loin des revenus des dirigeants d’entreprise du CAC 40. On est riche par rapport à l’immense majorité, pas vis-à-vis du plus haut de la distribution. Là encore, question de point de vue.
En conclusion
Toutes ces frontières sont critiquables. Quoi qu’il en soit, on ne peut que regretter la pauvreté du débat dans ce domaine. Un assez grand consensus existe pour maximiser le niveau de la pauvreté et minimiser celui de la richesse en élevant les seuils de ces deux catégories. Les classes moyennes deviennent un fourre-tout pratique permettant de rassembler des catégories hétéroclites. Comme le Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie (Crédoc) - voir encadré -, nous adoptons une position plus mesurée, qui n’est pas plus ou moins objective qu’une autre, mais qui a le mérite de mettre des données sur la table plutôt que de rester dans un épais brouillard.
La méthode : comment avons-nous fixé les limites ?
Nous utilisons le seuil de pauvreté à 50 % du niveau de vie médian : plus restrictif que celui à 60 % davantage utilisé, il a le mérite de rassembler des populations dont les niveaux de vie sont moins différents. Notre définition minimise donc le seuil. En utilisant la typologie réalisée par le Crédoc [2], nous considérons comme « populaires » les 30 % les plus pauvres et « aisés » les 20 % les plus riches. Les classes « moyennes » forment un noyau intermédiaire de 50 % de la population, situées entre les catégories populaires et aisées. Les « riches » sont ceux qui touchent deux fois plus que le niveau de vie médian, définition présentée en 1997 par Alternatives Économiques [3]. Elle n’est ni meilleure ni moins bonne que celle du taux de pauvreté pour en être simplement l’inverse, mais elle reste rarement utilisée.

Les limites que nous proposons sont plutôt basses : au sein des populations aisées et très riches, les écarts sont énormes. On pourrait opter pour des classes moyennes allant des 40 % du bas des revenus aux 10 % supérieurs. Mais il semble difficile de classer comme « moyen » une personne qui figure parmi les 10 % les plus aisés.

Nous ne décrivons pas l’ensemble des situations familiales pour des raisons de présentation. Il faudrait par exemple distinguer aussi le niveau de vie des familles monoparentales en fonction de leur nombre d’enfants. Dans notre typologie, on ne retient que les enfants à charge (fiscalement parlant) du ménage.

Ces données portent sur des moyennes pour la France métropolitaine, tous âges confondus. Elles portent sur les revenus et non les patrimoines, autre forme de richesse. Pour s’approcher encore plus près de la réalité du reste à vivre, il faudrait prendre en compte, notamment, le coût du logement. Vivre avec 3 000 euros pour un couple sans enfant n’est pas équivalent à Paris ou à Aurillac. A revenu identique, les écarts sont importants entre les propriétaires qui ont achevé de rembourser leurs emprunts et les locataires.
Données détaillées. Les données ci-dessous présentent l’ensemble des tranches de 10 % par type de ménage et permettent de recomposer les différentes catégories. Nous n’y avons pas fait figurer le seuil de pauvreté et de richesse qui s’obtiennent en divisant ou en multipliant le niveau de vie médian par deux.
Niveau de vie mensuel en fonction du type de famille
Limite supérieure de chaque tranche de revenu par type de ménage
Unité : euros

10 % 20 % 30 % 40 % 50 % 60 % 70 % 80 % 90 %
Personnes seules8561 0721 2391 3811 5211 6911 9122 2312 810
Familles monoparentales1 1671 4291 6131 7801 9952 2302 5312 8933 628
Couples sans enfant1 6982 0872 3712 6602 9523 2933 7784 4105 613
Couples avec un enfant2 0122 4952 8793 1983 5283 9084 3714 9966 298
Couples avec deux enfants2 2142 7783 1893 5163 8594 2374 7815 5566 863
Couples avec trois enfants ou plus2 1802 6563 0493 4353 8624 3274 8455 7287 343

Ensemble1 1321 4451 7432 0882 4622 8933 4134 0995 272
Après impôts et prestations sociales.
Source : Insee - Données 2013 - © Observatoire des inégalités
Photo / © elavuk81 - Fotolia.com

Notes

[1Attention, le seuil de l’Insee est une valeur théorique pour une « unité de consommation » fictive, qui permet de comparer l’ensemble des formes de ménages entre elles. Nous utilisons les données sur les revenus réellement perçus par type de ménage.
[2Les classes moyennes sous pression, Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie (Crédoc) - Consommation et modes de vie, n° 219 - mars 2009.
[3« Qui est riche en France ? », Louis Maurin, Alternatives Économiques, n°153, novembre 1997.
Date de rédaction le 7 avril 2014

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