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Faute de recul suffisant, les effets de l'exposition à long terme aux
radiofréquences n'avaient jusqu'ici pas pu être établis. Depuis la
Suède, précurseure de la téléphonie mobile, des chercheurs viennent de
publier la première étude sur le sujet. Ils mettent en évidence une
augmentation significative du risque de tumeur cérébrale pour les
utilisateurs de portable et de sans-fil après 20 années d’utilisation.
Voilà plus de 30 ans que les Suédois goûtent aux joies du «sans fil»[1];
une population idéale à étudier pour les oncologues et les spécialistes
des rayonnements, afin d’éclaircir la question des effets sanitaires des
téléphones portable et de leurs cousins sans fil après plus de 25 ans
d’utilisation. L’étude réalisée par l’équipe de Lennart Hardell[2] est
la première à étudier ces effets sur une aussi longue durée. Et elle met
en évidence une augmentation très significative du risque de tumeur
cérébrale associé aux radiofréquences (RF), puisque ce risque double
après 20 ans d’utilisation et triple au-delà de 25 ans. Ces résultats
viennent d’être publiés dans la revue International Journal of Oncology.
Etude solide
Les chercheurs suédois ont comparé l’incidence de tumeur cérébrale
auprès de deux populations exposées depuis les débuts de la technologie
«sans fil». La première (se fondant sur le registre national des
cancers) est constituée de malades âgés de 18 à 75 ans, chez qui le
diagnostic de cancer a été posé entre 2007 et 2009. Les 593 malades ont
été choisis en fonction de leur âge, sexe, facteurs héréditaires, etc.
Des critères également utilisés pour recruter la population-témoin,
constituée de 1.368 personnes, indemnes de toute pathologie et
utilisatrices de technologies «sans fil». «Cette étude est très solide
au plan épidémiologique, car on ne travaille pas à partir d’un
échantillon, mais bien à partir de la totalité de la population que l’on
souhaite analyser», souligne Janine Le Calvez, la présidente de
l’association Priartem[3].
Incidence en cloche
L’incidence des cancers suit une courbe en forme de cloche: après une
exposition allant de 1 à 5 années, les chercheurs mettent en évidence un
risque 80% plus important, qui décroît pour les 10 années qui suivent,
avant de repartir avec vigueur pour la période d’exposition comprise
entre 15 et 20 ans, où le risque est multiplié par deux, et par 3 pour
une exposition de 25 ans. «La question qui est posée ici, c’est de
savoir si l’exposition a favorisé l’apparition de quelque chose qui
était déjà en route –les RF auraient un effet promoteur- ou si elle est
à l’origine de la tumeur –avec un effet initiateur?», s’interroge Janine
Le Calvez, qui considère que la technologie numérique aurait les deux
caractéristiques. Et de relever une corrélation entre le côté de la tête
où est le plus souvent utilisé le téléphone portable et la localisation
de la tumeur.
Portable à 5 ans, tumeur à 30 ans?
Au vu de cette étude, qui vient consolider le classement en cancérigène
possible (2B) par le Circ en 2011, Priartem s’inquiète de l’exposition
de plus en plus précoce aux ondes. «Dans 25 ans, ils seront en pleine
trentaine, sauf que… l’utilisation durable du portable multiplie par
trois les risques d’être atteint d’une tumeur cérébrale (…) Ces
résultats doivent inciter plus que jamais les responsables de la santé à
informer largement la population des risques associés à l’usage du
portable et plus généralement à l’exposition aux radiofréquences.»
Le 15 octobre prochain, l’Anses publiera une mise à jour de l'évaluation
des risques liés aux radiofréquences.
[1] En Suède, la population a commencé à utiliser le «sans fil» dès 1981
(avec les téléphones analogiques), puis le digital en 1991, avant la 3G
en 2003.
[2] Lennart Hardell était déjà associé en 2011 au groupe de travail du
Centre international de recherche sur le cancer (Circ), constitué afin
d’évaluer le potentiel cancérogène de l’exposition aux champs
électromagnétiques de radiofréquences
[3] Priartem: Pour une réglementation des implantations des
antennes-relais de téléphonie mobile.
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