vendredi 20 mars 2015

Air France - Juniac ou la crapulerie de haut vol !

Alors que les pilotes tentent de négocier avec leur direction le
paiement de leurs jours de grève, "Marianne" révèle qu’Alexandre de
Juniac, leur PDG, avant le conflit et donc toute négociation avec ses
navigants, a constitué une nouvelle société aérienne profilée pour
accompagner le développement de ses vols low cost : Transavia Company.
Et qu'une holding Transavia Europe Aviation a été discrètement
préenregistrée… au Portugal.
Décidément, Air France-KLM n’en finit plus de surprendre. Alors que la
compagnie préférée des Français a réussi à rétablir, après quatorze
jours de mouvement social, la totalité de ses vols, la tension remonte à
Roissy. Selon les informations du Point et du Figaro, certains
commandants de bord et copilotes, ergotent en effet sur le décompte de
leurs jours de grève et tentent de s’en faire rembourser une partie. Des
réclamations que la compagnie, s’appuyant sur une jurisprudence de la
Cour de cassation, exclut de satisfaire. D’autant plus qu’elles ulcèrent
les stewards, les hôtesses, les vendeurs qui ont vu leurs primes fondre
de plusieurs centaines d’euros au bas de leur feuilles de paye, du fait
de l’annulation des vols…
 
Gageons donc que dans ce climat délétère, les documents que
révèlent Marianne ne vont pas apaiser les salariés, ni les syndicats de
pilotes , SNPL Air France ALPA, Spaf et Alter. Les actes du greffe de
Bobigny que nous nous sommes procurés, indiquent en effet qu’Alexandre
de Juniac, avant même que les pilotes ne déposent leur préavis de grève
le 29 août dernier, avait déjà constitué une nouvelle société aérienne,
aujourd'hui dénommée Transavia Company, capable selon ses status de
prendre des initiatives sur des sujets bloqués au sein de Transavia
France. Et pour le faire à la barbe de ses personnels, le PDG a pris un
chemin bien solitaire…

  Une coquille dormante est réactivée
Tout commence à la fin juillet 2014 (voir les documents
ci-dessous). Alexandre de Juniac se fait nommer à la présidence d’une
coquille dormante d’Air France-KLM Finance, enregistrée depuis 2012 sous
le nom de Mileshouse dont l’objet officiel est l’exploitation notamment
de programmes de fidélité. Dès le 1er août, il en change l’activité.
Mileshouse devient alors une société de transport aérien de personnes et
de marchandises dont l’objet est autant de louer des avions, que d’en
acheter ou de prendre des participations dans des compagnies tierces.
Bref une toute nouvelle compagnie aérienne à laquelle il ne manque plus
qu’un agrément.

Le 10 août, dans la torpeur des vacances, nouvelle étape. Le PDG cède
toujours discrètement  la présidence de cette société par actions
simplifiées à Abraham Graber, le président de la société hollandaise
Transavia.com.

Enfin, le 19 septembre, alors que les pilotes sont déjà en grève depuis
quatre jours, Mileshouse prend le nom de Transavia Company. S'agit-il
pour Alexandre de Juniac, épaulé par Abraham Graber de commander
discrètement les Boeing 737 dont il a besoin sans alerter ses navigants
? De signer des leasings ? De recruter sans attendre au moins 15 mois,
comme l’y oblige les clauses de dénonciations de l’accord en vigueur
avec les pilotes de Transavia France? Contactée par Marianne, la
direction d'Air France nous a simplement communiqué cette énigmatique
réponse: « Comme tout groupe, Air France-KLM dispose d'entités
juridiques activables en fonction de ses besoins : partenariat,
financement et développement. »

Mais ce n’est pas tout. En consultant le registre des sociétés
commerciales du Portugal du 1er octobre, Marianne a également découvert
qu’une étrange holding dénommée Transavia Europe Aviation y était
toujours pré-enregistrée sous le numéro 513 237 810. S'agit-il de la
holding que le PDG défendait avant d'affirmer renoncer officiellement à
ce projet le 24 septembre, devant ses salariés, le gouvernement et le
Premier ministre Manuel Valls ? Sans apporter aucune explication au
pré-enregistrement d'une entité lusitanienne au nom de Transavia,
éventuellement par un tiers avocat, la direction d'Air France-KLM
affirme simplement que « Transavia Europe n'a jamais existé et n'existe
pas. Aucune société dans la perspective du projet Transavia n'a été
déposé par Air France ou Air France-KLM. »

Socialement, politiquement, ce manque de transparence est pourtant
risqué. Car les personnels d’Air France-KLM, comme ceux de Transavia
France, déboussolés, risquent  de perdre confiance dans leur direction.
Quant aux députés auxquels Alexandre de Juniac a déclaré, la main sur le
cœur, fin septembre en audition, qu’il menait un dialogue social ouvert,
de haute volée, ils pourraient s’estimer menés en bateau. Surtout, dans
une compagnie qui, de l’aveu même de son PDG, n’a que quelques mois
devant elle pour offrir aux Français des vols de loisirs qui les
détournent d’Easy Jet ou de Ryan air, il devient urgent d'asseoir toutes
les professions à la table des négociations. Si du moins, c'est encore
possible...

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