mardi 24 mai 2016

Espagne. Podemos et Izquierda Unida ensemble pour la gagne

Source : l'Humanité


photo : juan carlos

Rassemblées « pour gagner le pays » et les législatives du 26 juin, les deux formations de gauche se sont alliées au sein d’Unidos Podemos. Aux dernières estimations, l’alliance anti-austérité obtiendrait 88 sièges de députés (73 pour le Parti socialiste ouvrier espagnol et 112 pour le Parti populaire).
Podemos, constitué en 2014, a siphonné une partie de l’électorat d’Izquierda Unida (IU, la gauche unie qui regrou­pe des partis de la gauche radicale, notamment le Parti ­communiste d’Espagne – PCE) en se présentant comme la force antisystème, anti-« castes », anticorruption généralisée. Historiquement, les principaux dirigeants de Podemos sont des universitaires issus d’IU : ils l’ont quittée à la suite de crises internes. Ils ont en quelque sorte « tué le père » pour voler de leurs propres ailes.
une alliance En tête chez les moins de 55 ans
Les intellectuels communistes Manuel Monereo et Julio Anguita restent des « mentors idéologiques » de Podemos, qui a su s’adapter à la nouvelle situation née de la crise (2008) et du tsunami des Indignés (15 mai 2011). Podemos a révolutionné la « grammaire politique » et intégré de nouveaux apports. Constitué en parti, il a ouvert un débouché ­politique (les Indignés étaient ­plutôt réfractaires à la politisation). Critiqué pour sa volonté hégémonique, Podemos a opéré au printemps dernier un recentrage, a mûri, écouté la forte aspiration populaire au rapprochement avec Izquierda Unida.
Les deux jeunes leaders, Pablo Iglesias, pour Podemos, et ­Alberto Garzon, pour IU, ne cachent pas leurs liens d’amitié. Ils se sont rencontrés dans le mouvement des Indignés, dans ses remises en cause, ses « utopies », ses constats si lucides (soutenus par 82 % de la population). Une fraction des militants Indignés a considéré qu’un mouvement uniquement de protestation ne suffisait pas à mettre fin aux politiques néolibérales dévastatrices (chômage à 24 %, exil de plus de 400 000 jeunes ­diplômés, record européen des inégalités, etc.). Le mouvement du 15 mai s’est transformé en mouvement politique d’alternative.
Au sein du PCE et d’IU, l’irruption fracassante de Podemos cliva les positions. Après la défaite électorale du 20 décembre 2015 (deux députés IU élus), Alberto Garzon prit du poids dans l’organisation divisée et contribua à tirer les ­leçons nécessaires de l’échec sans brader l’identité d’IU, seule force politique nationale d’opposition de gauche depuis trente-sept ans. Même dans les moments difficiles, Alberto Garzon s’est interdit toute criti­que publique et a continué à ten­dre la main à Podemos (en perte de vitesse depuis quelques mois, sous le feu nourri du système). Pour les piliers d’un bipartisme moribond, Podemos, Garzon et Iglesias sont les cibles à abattre politiquement. Et plus encore depuis l’annonce, symboliquement à la Puerta del Sol, de l’accord électoral Podemos-IU. Panique à droite et au PSOE ! On ressort les thèmes franquistes les plus rances, les services policiers fouillent dans les poubelles.
L’alliance Podemos-IU – Unidos Podemos, UP – a été approuvée massivement lors d’une consultation des militants (98 % des votants pour le premier et 87,8 % pour la seconde). Et l’alliance, ouverte aux mouvements sociaux et à d’autres petites formations (Equo, Compromis…), arriverait en tête chez les moins de 55 ans. L’accord de gouvernement qui en résulte, en 50 points, s’apparente à un programme politique global. L’accord balaie tous les secteurs. En vrac : protection urgente des plus démunis, fin des politiques néolibérales austéritaires, de la corruption, prise en compte de la « plurinationalité » de l’Espagne, amélioration des services de santé, nouvelle « loi éducative », suppression des atteintes à la législation du travail, plan national de transition énergétique, processus de modification de la Constitution, nouveau modèle productif, SMIC à 800 euros, audit et restructuration de la « dette hypothécaire », création d’une banque publique, réforme fiscale, etc. Enfin, chaque formation mènera campagne pour le 26 juin comme elle l’entend…

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