18 mai 2015 par Archicool
Echec d’aménagement, échec urbain, échec architectural. Sans doute cet
équipement urbain, inauguré il y a quatre ans (le 24 avril 2011) sera
cité dans les écoles d’architecture et d’urbanisme comme l’exemple
parfait de tout ce qu’il ne faut pas faire. Et pourtant cela a été fait !
Le site était exceptionnel ; au bord de l’eau, à l’intersection entre le
canal Saint-Denis et l’ancien bassin du site de stockage dénommé
“Magasins généraux de Paris“, le tout étant navigable mais quasiment
désaffecté. Il y avait l’occasion ici d’aménager un véritable projet
d’avenue fluviale sur plus de deux kilomètres de long entre les deux
écluses au nord et au sud, une mini Venise branchée. A cheval sur deux
communes, Paris (au sud du site) et Aubervilliers, au nord.
Lorsqu’il n’y a rien, il n’y a rien !!!!!
Il n’en a rien été ! trop ambitieux sans doute, alors le choix retenu
sera de tourner le dos à l’eau, et d’orienter l’axe et l’entrée du
centre commercial, non pas vers Aubervilliers, mais vers Paris, pourtant
ici éloigné de plusieurs centaines de mètres et séparé physiquement de
par la frontière du Périphérique et son nuage de pollution aux
particules fines.
Au coeur d’une vaste friche industrielle, le Millénaire est surtout au
coeur de nulle part. L’échec était inévitable… et personne n’a rien vu
! Magie de l’hyper communication de quelques private equity et autres
organismes fonciers qui ploient sous les fortunes collectées ici ou là,
(peut être la votre est-elle placée dans une “foncière“ dont les banques
aiment tant vous vanter la fameuse “solidité de la pierre.” )
Fortunes dont ensuite ils ne savent que faire. Ici c’est ICADE et
KLEPIERRE les maîtres d’ouvrages, pour 200 millions d’euros chacun, soit
une opération de près de 400 millions d’euros; et l’architecte
coordonateur, parce qu’il y a un architecte ! est un dénommé Antoine
Grumbach, peu connu dans les revues professionnelles internationales,
mais comme c’est un enseignant à Paris Belleville, on dira donc que
c’est un génie ! Le voici bombardé architecte coordonateur de la ZAC
Canal Porte d’Aubervilliers et architecte du Millénaire. Le résultat
semble copié-collé des centres commerciaux californiens d’il y a trente
ans… et encore !!! En fait il n’y a pas la moindre trace visible
d’intelligence collective dans cette opération.
Bourrée de qualificatifs et d’acronymes à la mode des années 2010 comme
HQE et BREAM, nous devions voir ce que nous devions voir ! nous
annonçait la brochure remise à la Presse au moment de l’inauguration en
2011 : 55 000m2, 140 Commerces, un Hyper Carrefour, des bureaux, des
bureaux et encore des bureaux, et des espaces verts, 14 (Quatorze)
millions de visiteurs attendus par an, … ils ne seraient finalement
aujourd’hui que 6 (Six) millions à avoir répondu à l’appel. Un véritable
accident industriel !
La FNAC, une des enseignes locomotives, décide de baisser le rideau manu
militari dès 2012. Pas question ! lui dit son bailleur, qui lui fait un
procès. Tu restes avec nous ! Bonjour l’ambiance. Finalement La
deuxième fermeture sera la bonne en 2013. Adieu la Fnac qui constate à
ses dépends qu’il n’y a pas d’acheteurs ici pour ses jolis produits.
Même pendant les soldes… personne ne vient ! ce qui fait rire la presse
spécialisée ; Citation; “Près de deux ans d’existence, et même un jour
de soldes, ce jeudi 10 janvier, règne dans les magasins une étrange
atmosphère. Comme si nous étions au cœur de The Truman Show, dans un
faux centre commercial en carton-pâte créé à la va-vite pour les besoins
du film. Preuve ultime que quelque chose ne tourne pas rond : à la FNAC,
au premier étage, aucune caisse n’est ouverte (voir la photo). Pas une :
c’est l’accueil/billetterie qui sert de caisse. Dans les allées, la FNAC
est presque aussi silencieuse qu’une bibliothèque. Même petit jeu de
calcul devant Carrefour : un peu avant midi, deux caisses (plus celles
en libre-service) sont ouvertes. Et personne n’attend. Personne ne
gueule. Où est la caméra cachée ?“ s’interrogeait en 2013 Street Press.
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Quatre ans après, le résultat est toujours aussi rance, étouffant,
l’architecture insignifiante ou au mieux démodée, mais surtout sans
direction, sans âme, mais qu’est ce que l’on fait là ? Ou sont passés
les 400 millions ? le maigre public, ce vendredi 15 mai 2016 à 17H, et
bien falot dans des espaces trop grands et sans intelligence, on se
dirait un lundi matin à l’ouverture.
Les enseignes les plus connues fuient la mauvaise affaire, entre 20 et
30 espaces commerciaux sont déjà fermés, remplacés par de jolies
calicots collés sur des panneaux nous promettant la venue de nouveaux
commerces. Les “locomotives“ sont donc parties; Adieu Les FNAC et
Desigual. Vous voulez déjeuner au bord de l’eau ? Vous avez le choix
entre Flunch et McDonald. Hyper branché non ? et bon appétit !
Trop cheap pour Paris ! et trop luxueux pour Aubervilliers, qui ne
dispose pas, et ne disposera pas avant une ou deux décades d’une zone de
chalandise adaptée à cette offre. Il suffit de se promener dans les
ruelles industrielles et industrieuses d’Aubervilliers pour comprendre
qu’une FNAC n’a rien à faire ici. Ici le commerce c’est plutôt le bazar
à cent sous !
Paris ?
Juste de l’autre coté du périphérique, coté Paris, une autre opération
urbaine de grande ampleur souffrira t’elle des mêmes maux ? la ZAC
Claude Bernard, et au sud, le fameux ancien entrepôt McDonald,
gigantesque barre de plusieurs centaines de mètres de long, longeant le
boulevard des Maréchaux. Quasiment indestructible, cette enceinte sera
finalement surélevée façon cadavre exquis. on viendra même chercher le
génial Rem Koolhaas, avant de le remercier pour confier les restes à un
dénommé François Leclercq, qui se dit urbaniste maintenant, Mais un
Leclercq ne vaut pas mieux qu’un Grumbach, et le ghetto est en marche
dans un encombrant bazar de formes sans imagination et sans direction,
qui à défaut de faire fuir les enfants, (tout de même n’exagérons rien
!) font fuir les investisseurs et les habitants. La ville et sa
fabrication en France sont un échec permanent. Mais tout continue comme
avant, c’est cela l’hyper-communication ! le Truman show assez bien vu
de street Press. En France on fait de l’immobilier pour classe moyenne
solvable, et pas de la Ville pour tous et avec tout le monde.
Il fallait donc réagir ; cela sera le Tramway T3, le prolongement du
métro, et deux passerelles piétonnes, dont une au dessus du
périphérique. Les deux financées par la généreuse SEMAVIP (Ville de
Paris et Caisse des Dépôts,) qui, visiblement ne sait pas quoi faire de
son argent, et vous offrira ainsi une expérience sensorielle inédite ;
la traversée d’une nuage de pollution aux particules fines parmi le plus
dense que vous pouvez trouver au dessus du périphérique. Vos poumons
vous en remercieront un jour, mais ceux qui l’utiliseront
quotidiennement, en seront ils avertis ?
La bonne conscience de l’aménageur et de la ville de Paris ne doit pas
être complètement intacte puisqu’ils se dépêchent d’aménager à cet
endroit même, “une forêt linéaire,“ (SIC) La première de Paris (SIC)
nous annonce fièrement le panneau de chantier, qui consiste en la
plantation d’un bande, d’une quinzaine de mètres de large, d’essences de
diverses tiges hautes sur plusieurs centaines de mètres de longs. Sans
doute davantage une urgence sanitaire juste après avoir construit des
centaines de logements et des milliers de m2 de bureaux à quelques pas
du périphérique.
Les deux passerelles, financées par la SEMAVIP, desservent en fait
quatre immeubles situés à Paris, mais au delà du Périphérique extérieur.
Et oui le Périphérique ne suit pas toujours exactement la frontière de
Paris.
Ensuite elle desserviront le Millénaire d’Aubervilliers. Mais
curieusement elles ne sont pas la réponse à un flux naturel existant,
mais un véritable cadeau fait au centre commercial et à Aubervilliers,
pour essayer d’atténuer l’accident industriel propre à Icade et Klepierre.
Financées avec l’argent des Parisiens. La conception de ces deux
passerelles furent confiées à deux équipes de concepteurs, ayant leurs
entrées à Paris,
A savoir ; L’agence DVVD, et Exploration, cette dernière bien connue
pour avoir déjà signé, il y a quelques années maintenant, le signal
olympique qui avait fait l’objet de moqueries et d’un concours arrangé.
La passerelle de DVVD
Toute en courbes, la passerelle conçue par l’agence, d’ingénieurs
architectes, qui monte à Paris, en tout cas que l’on retrouve dans les
chantiers les plus prestigieux de Paris (Arena Bercy ex POPB,
Roland-Garros,) étonne de la part d’ingénieurs. En effet en statique
les forces physiques ne travaillent pas en courbe. Pour un ingénieur;
Qui dit courbes, dit formes impures et gâchis de matières. Ceux qui ont
lu, dans leur enfance, le Pont de la Rivière Kwai de Pierre Boulle,
savent que l’oeuvre d’une vie d’un ingénieur est d’arriver à économiser
quelques centaines de grammes sur une poutrelle métallique. Là est
l’exigence de l’ingénieur. Même la Tour Eiffel dont la dentelle reliant
les piliers du premier étage dessine une majestueuse courbe…. est une
décoration. En fait une véritable imposture, elle ne sert à rien cette
dentelle de fer. Vous pouvez l’enlever la tour ne bougera pas d’un
centimètre. Seuls sur les ouvrages-d’art la déclivité et la courbure
peuvent se justifier pour retarder le moment de résonance de ce même
ouvrage. Nous sommes donc dans une oeuvre d’ingénieur qui gesticule un
peu. La pose de son tablier au dessus du périphérique a eu lieu d’un
seul tenant dans la nuit du Jeudi 14 mai 2015, mais il faudra attendre
septembre 2015 pour en gouter les vertus.
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