Source : Dormira jamais
" Tout est près. Les pires conditions matérielles sont excellentes. Les
bois sont blancs ou noirs. On ne dormira jamais." André Breton,
Manifeste du surréalisme, 1924.
Chaque
matin, à me réveiller encore sous la voûte céleste, je sens que c’est
pour moi la nouvelle année. C’est pourquoi je hais ces nouvel an à
échéance fixe qui font de la vie et de l’esprit humain une entreprise
commerciale avec ses entrées et sorties en bonne et due forme, son bilan
et son budget pour l’exercice à venir. Ils font perdre le sens de la
continuité de la vie et de l’esprit. On finit par croire sérieusement
que d’une année à l’autre existe une solution de continuité et que
commence une nouvelle histoire, on fait des résolutions et l’on regrette
ses erreurs etc. etc. C’est un travers des dates en général. On dit que
la chronologie est l’ossature de l’Histoire; on peut l’admettre. Mais
il faut admettre aussi qu’il y a quatre ou cinq dates fondamentales que
toute personne bien élevée conserve fichée dans un coin de son cerveau
et qui ont joué de vilains tours à l’Histoire. Elles aussi sont des
nouvel an. Le nouvel an de l’Histoire romaine, ou du Moyen Âge, ou de
l’Époque moderne. Et elles sont devenues tellement envahissantes et
fossilisantes que nous nous surprenons nous-mêmes à penser quelquefois
que la vie en Italie a commencé en 752, et que 1490 ou 1492 sont comme
des montagnes que l’humanité a franchies d’un seul coup en se retrouvant
dans un nouveau monde, en entrant dans une nouvelle vie. Ainsi la date
devient un obstacle, un parapet qui empêche de voir que l’histoire
continue de se dérouler avec la même ligne fondamentale et inchangée,
sans arrêts brusques, comme lorsque au cinéma la pellicule se déchire et
laisse place à un intervalle de lumière éblouissante. Voilà pourquoi je
déteste le nouvel an. Je veux que chaque matin soit pour moi une année
nouvelle. Chaque jour je veux faire les comptes avec moi-même, et me
renouveler chaque jour. Aucun jour prévu pour le repos. Les pauses je
les choisis moi-même, quand je me sens ivre de vie intense et que je
veux faire un plongeon dans l’animalité pour en retirer une vigueur
nouvelle. Pas de ronds-de-cuir spirituels. Chaque heure de ma vie je la
voudrais neuve, fût-ce en la rattachant à celles déjà parcourues. Pas de
jour de jubilation aux rimes obligées collectives, à partager avec des
étrangers qui ne m’intéressent pas. Parce qu’ont jubilé les
grands-parents de nos grands parents etc., nous devrions nous aussi
ressentir le besoin de la jubilation. Tout cela est écœurant.(Antonio Gramsci, 1er janvier 1916 sur l’Avanti!, édition de Turin, rubrique « Sotto la Mole ») Traduit par Olivier Favier.
Odio il capodanno
Ogni
mattino, quando mi risveglio ancora sotto la cappa del cielo, sento che
per me è capodanno.Perciò odio questi capodanni a scadenza fissa che
fanno della vita e dello spirito umano un’azienda commerciale col suo
bravo consuntivo, e il suo bilancio e il preventivo per la nuova
gestione. Essi fanno perdere il senso della continuità della vita e
dello spirito. Si finisce per credere sul serio che tra anno e anno ci
sia una soluzione di continuità e che incominci una novella istoria, e
si fanno propositi e ci si pente degli spropositi, ecc. ecc. È un torto
in genere delle date.Dicono che la cronologia è l’ossatura della storia;
e si può ammettere. Ma bisogna anche ammettere che ci sono quattro o
cinque date fondamentali, che ogni persona per bene conserva conficcate
nel cervello, che hanno giocato dei brutti tiri alla storia. Sono
anch’essi capodanni. Il capodanno della storia romana, o del Medioevo, o
dell’età moderna. E sono diventati cosí invadenti e cosí fossilizzanti
che ci sorprendiamo noi stessi a pensare talvolta che la vita in Italia
sia incominciata nel 752, e che il 1490 0 il 1492 siano come montagne
che l’umanità ha valicato di colpo ritrovandosi in un nuovo mondo,
entrando in una nuova vita. Così la data diventa un ingombro, un
parapetto che impedisce di vedere che la storia continua a svolgersi con
la stessa linea fondamentale immutata, senza bruschi arresti, come
quando al cinematografo si strappa la film e si ha un intervallo di luce
abbarbagliante.Perciò odio il capodanno. Voglio che ogni mattino sia
per me un capodanno. Ogni giorno voglio fare i conti con me stesso, e
rinnovarmi ogni giorno. Nessun giorno preventivato per il riposo. Le
soste me le scelgo da me, quando mi sento ubriaco di vita intensa e
voglio fare un tuffo nell’animalità per ritrarne nuovo vigore. Nessun
travettismo(1). Ogni
ora della mia vita vorrei fosse nuova, pur riallacciandosi a quelle
trascorse. Nessun giorno di tripudio a rime obbligate collettive, da
spartire con tutti gli estranei che non mi interessano. Perché hanno
tripudiato i nonni dei nostri nonni ecc., dovremmo anche noi sentire il
bisogno del tripudio. Tutto ciò stomaca.(Antonio Gramsci, 1° Gennaio 1916 su l’Avanti!, edizione torinese, rubrica « Sotto la Mole »)
- La voce « travettismo » è derivata dal piemontesismo « travet » che designa un « impiegato di basso livello e mal retribuito che svolge scrupolosamente un lavoro monotono e, anche, poco gratificante (e, con valore ironico, ne indica la mancanza di personalità, di iniziativa e di motivazioni) » (Grande Dizionario della Lingua Italiana). Si tratta del nome del protagonista della commedia piemontese di Vittorio Bersezio Le miserie di Monsù Travet (1862) divenuto il paradigma dell’impiegato dalla vita grigia e con prospettive limitate. []
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