Source : Biosphère
Les chercheurs
du Muséum national d’Histoire naturelle et du CNRS arrivent au même
constat : les oiseaux des campagnes françaises disparaissent à une
vitesse vertigineuse. Le STOC (Suivi Temporel des Oiseaux Communs)
produit des indicateurs annuels sur l’abondance des espèces dans
différents habitats (forêt, ville, campagne etc.). Les relevés effectués
en milieu rural mettent en évidence une diminution des populations
d’oiseaux vivant en milieu agricole depuis les années 1990. Les espèces
spécialistes de ces milieux, comme l’alouette des champs, la fauvette
grisette ou le bruant ortolan, ont perdu en moyenne un individu sur
trois en quinze ans. Et les chiffres montrent que ce déclin s’est encore
intensifié en 2016 et 2017… En 23 ans, toutes les espèces d’oiseaux de
plaine ont vu leurs populations fondre : l’alouette perd plus d’un
individu sur trois (-35%) ; avec huit individus disparus sur dix, les
perdrix sont presque décimées. Ce déclin frappe toutes les espèces
d’oiseaux en milieu agricole, aussi bien les espèces dites spécialistes –
fréquentant prioritairement ce milieu -, que les espèces dites
généralistes – retrouvées dans tous les types d’habitats, agricoles ou
non. Or d’après le STOC, les espèces généralistes ne déclinent pas à
l’échelle nationale ; la diminution constatée est donc propre au milieu
agricole, sans doute en lien avec l’effondrement des insectes. Le déclin des oiseaux en milieu agricole s’accélère et atteint un niveau proche de la catastrophe écologique.
En 2018, de nombreuses régions de plaines céréalières pourraient connaître un printemps silencieux
(« Silent spring ») annoncé par l’écologue américaine Rachel Carson il y
a 55 ans à propos du tristement célèbre DDT interdit en France depuis
plus de 45 ans. Cette
disparition massive observée à différentes échelles est concomitante à
l’intensification des pratiques agricoles ces 25 dernières années, plus
particulièrement depuis 2008-2009. Une période qui correspond entre
autres à la fin des jachères imposées par la politique agricole commune,
à la flambée des cours du blé, à la reprise du sur-amendement au
nitrate permettant d’avoir du blé sur-protéiné et à la généralisation
des néonicotinoïdes, insecticides neurotoxiques très persistants. (Communiqué de presse du Muséum national d’Histoire naturelle– 20 mars 2018)
LE MONDE* reprend ce communiqué de presse et ajoute le constat de Frédéric Jiguet, professeur de biologie de la conservation au Muséum et coordinateur du réseau d’observation STOC : « Trois
pays, les Pays-Bas, la Suède et le Royaume-Uni, ont mis en œuvre des
politiques nationales volontaristes pour inverser cette tendance lourde,
en aménageant à la marge le modèle agricole dominant. Aucun
de ces trois pays n’est parvenu à inverser la tendance : pour obtenir
un effet tangible, il faut changer les pratiques sur des surfaces
considérables. Sinon, les effets sont imperceptibles. Ce n’est pas un
problème d’agriculteurs, mais de modèle agricole : si on veut enrayer le
déclin de la biodiversité dans les campagnes, il faut en changer, avec
les agriculteurs. » Nicolas Hulot a du pain sur la planche, d’autant plus que le ministre de l’agriculture (Stéphane Travert) est inféodé au système agro-industriel de la FNSEA.
* LE MONDE du 21 mars 2018, Les oiseaux disparaissent des campagnes françaises à une « vitesse vertigineuse »
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire